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Ces dernières semaines avaient amené plus de soucis qu’à l’ordinaire. Habituellement Zevran se considérait comme un maître dans l’art de ne pas s’attarder sur le négatif de sa situation et de toujours garder l’œil ouvert pour les éventuelles portes de sorties inattendues qu’offraient parfois les catastrophes. Après tout, certains épisodes de sa vie n’étaient que cela : des portes ouvertes au moment où il pensait que s’était terminé.
S’il était honnête avec lui même, il devait admettre que sa situation actuelle n’était pas si dramatique. C’était simplement que les emmerdes semblaient s’être donné rendez vous. Il n’y avait que quelques jours de voyage entre Terebinthe et les Tombes d’Émeraudes, mais il avait pris son temps pour arriver, il était à la lisère de la forêt, ayant organisé un campement de fortune qui consistait essentiellement en son sac de couchage et son feu de camps, ainsi que son cheval qui attaché à un arbre, broutait l’herbe paisiblement.
Il aurait sans doute pu trouver les Bellanaris avant la tombée du soir s’il ne s’était pas arrêté si tôt, mais il avait ressenti le besoin de prendre son temps. Il ouvrit encore une fois son carnet noir et déplia les trois lettres que Wulf lui avait remis. La première était une missive de Leandro qui l’informait des avancées de leurs affaires. Les retombées de ses derniers coups de dagues dans le dos des Corbeaux, les représailles à guetter, les nouveaux alliés… et des remontrances. Il avait apparemment entendu parler des aventures qu’ils avaient eut avec Siha au Manoir et à la maison de passe sur la côte et cela ne le faisait pas du tout rire.
« Si tu crois que je ne sais pas reconnaître les signes, tu te trompes. » écrivait-il. « Tu t’es trouvé une nouvelle passion et tu as décidé que c’était plus important que tes devoirs à Antiva. Normalement je ne dis rien, car tes jeux ne durent pas plus de quelques semaines et que tu finis toujours par te concentrer sur tes mission, mais je crains que ta nouvelle conquête ne te détourne de ce qui est vraiment important dans ta vie, et si tu n’es plus à la hauteur, je trouverai quelqu’un d’autre pour faire le travail qui doit être fait à ta place. »
Il poussa un soupir résigné. Il était vrai qu’il se concentrait plus sur Siha ces derniers temps qu’il ne le devrait, le fait que cela le travail autant était probablement dû au fait que l’intensité de leur lien n’était pas couplé de l’habituel proximité physique qu’il avait connu avec ses précédentes « passions »… comme disait Leandro. Mais étrangement il n’avait particulièrement envie de presser Siha sur ce terrain, il n’avait pas vraiment envie de passer à autre chose non plus pour le moment. La relation qu’il avait avec l’archiviste était à la fois la plus frustrante et la plus satisfaisante qu’il avait eut depuis bien longtemps, il était intrigué de voir comment les choses allaient évoluer…. Et il n’avait pas particulièrement envie de se retrouver dans la même situation qu’à Térébinthe…. Il ne savait pas d’où était venu cette soudaine panique mais il n’avait pas particulièrement envie de devoir gérer ça dans l’immédiat si cela devait se représenter…
Il y avait la seconde lettre, un nom, un descriptif, la mention d’une récompense. Je soupçonnais fortement que Leandro ait envoyé celle-ci aussi, car personne n’aurait jamais envoyé de contrat à Fort Bastel. Il faudrait que je m’occupe de ça rapidement, d’après le message, la cible était en fuite vers Val Royaux.
Et enfin il y avait la troisième, dans laquelle était plié un petit message qui avait été livré par corbeaux peu de temps après qu’il eut quitté Terebinthe. Allegra avait quitté son clan. Apparemment elle était à Rialto lorsqu’un Corbeau lui était tombé dessus. Elle avait été reconnue et par miracle avait réussi à tuer son agresseur avant de fuir. Mais son clan considérait qu’elle représentait un trop grand danger à présent et treize ans plus tard…. Elle était livré à elle-même. Enfin presque, son archiviste l’avait dirigée vers Jezabel, qui l’avait envoyée vers Wulf. L’adolescente était sur un bateau à destination d’Amaranthine avec un message à l’intention du Héro de Ferelden. Le pire c’était qu’il n’avait ni le temps ni le courage de l’intercepter. Qu’allait-il dire à la jeune fille ? De rentrer chez elle ? Elle n’en avait plus. Il avait décidé de laisser Wulf gérer ça comme il le voulait. De plus, il ne souhaitait pas la rencontrer, cela avait été suffisamment difficile de décider de son sort sans la connaître, il ne voulait même pas savoir si elle ressemblait à Rinna… ou à lui…
Il replia le tout et le rangea dans son sac, éteignit le feu alors que la nuit tombait et s’appuya contre le tronc de l’arbre derrière lui avec un soupire. Voir Siha allégerait probablement ses pensées, il fallait qu’il dorme un peu avant de reprendre la route, les Tombes étaient parsemées de templiers rouges, d’ogres et d’autres créatures passablement dangereuses, il avait besoin de se reposer. Au lieu de cela il laissa son esprit vagabonder en regardant les étoiles, la nuit était très avancée quand il parvint enfin à somnoler.
******
Au matin il sella son cheval et reprit son chemin, l’humeur moins joueuse qu’à l’ordinaire mais le cœur un peu moins lourd que la veille. Trouver le clan ne fût cependant pas tâche facile La forêt était si dense qu’il était impossible de sonder les bois, monter sur des collines ou des pierres ne se révélait d’aucune utilité tant la cime des branches était haute, et ne parlons pas de trouver un point d’eau, il se perdit tellement qu’il se retrouva face à un Mistral…. Il ne manquait pas de courage mais il s’en alla aussi discrètement qu’il était arrivé en priant pour que le dragon ne l’ait pas vu. Heureusement pour lui l’animal avait visiblement des choses plus importantes à faire que de surveiller les alentours et il s’en tira sans mal. Il était passé midi lorsqu’il trouva enfin des traces d’aravels. Avec un soupir de soulagement il remonta les traces en priant pour que la piste mène quelque part.
Sa patience et ses dons de pistages furent récompensés quelques heures plus tard. Une fois n’est pas coutume, il tomba sur un visage connu. Rasdir. Il étreignit l’elfe avec vigueur, heureux d’être enfin arrivé à destination et se félicitant de s’être arrêté pour la nuit. Le dalatien prit les devants et Zevran le suivit à pieds, son cheval marchant derrière lui d’un air désintéressé. La vue des Aravels libéra une angoisse qu’il n’avait pas senti monter en lui, il était enfin arrivé… il ne restait plus qu’à trouver Siha dans toute cette joyeuse animation.
![Lasa ar’an alas’nira [SMJ - PV Siha] Latest?cb=20150523145513](https://vignette.wikia.nocookie.net/dragonage/images/5/55/Text_ico.png/revision/latest?cb=20150523145513)
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Se protégeant les yeux pour regarder vers la cîme des arbres, Siha inspira l'air frais du matin tout en espérant que le soleil finirait par bannir les restes de sa mauvaise humeur. Une fois n'est pas coutume la nuit avait été longue et agitée, son sommeil au moins aussi irrégulier que la météo ces derniers jours. Pourtant son esprit se trouvait plus en paix depuis qu'il avait retrouvé les Tombes d'Émeraude et leur paisible silence, depuis qu'il avait revu le visages des membres du clan et pu constater avec soulagement la vitesse à laquelle les derniers arrivants s'étaient intégrés.
Parmi les réfugiés qui avaient rejoint les rangs de Felassan récemment, c'était néanmoins Alice qui le surprenait le plus. En effet à la voir se dépatouiller si naturellement avec les tâches du quotidien, se chamailler en permanence avec Cyr et faire les quatre cent coups avec la complicité de Rasdir, on n'aurait jamais deviné qu'elle n'était pas née Bellanaris. Il soupira, écartant quelques mèches qui s’étaient échappées de sa natte.
Observant silencieusement l'adolescente aider la grisonnante Isehra à étendre le linge, avec la même douce patience de la petite fille qui empêche sa grand-mère de se surmener, Siha sourit. Cette dernière avait beau râler et lancer des traits d'esprit à tort et à travers, elle semblait étonnamment heureuse de sa nouvelle vie, aussi modeste soit-elle. Et tout bien réfléchi devoir se faire passer pour un tortionnaire afin de tirer deux personnes d'affaire resterait à jamais un souvenir douloureux, mais au moins il pouvait se satisfaire de ces sourires insouciants, qui feraient presque passer la vie d'esclave pour un malentendu. Voilà sa principale satisfaction, le sentiment qui rendait le sacrifice de sa fierté, de sa tranquillité et les frayeurs répétées presque acceptables.
Posant son seau vide à côté de l'enclos des hahls qui s'approchèrent aussitôt, l'archiviste finit de les nourrir avant d'éponger son front moite au tissu blanc de sa manche. Parlant aux animaux à voix basse pendant plusieurs minutes, il caressa les bois et les flancs de la peu farouche Ankhil, une femelle dont le ventre proéminent laissait présager un futur heureux événement. Tapotant son museau dans une taquinerie qui leur était propre, le mage finit par enfin s'écarter en traînant les pieds, un peu à regret. Prendre soin des hahls était toujours un peu épuisant, mais tant que le choix lui appartiendrait c'était une tâche qu'il ne laissait à personne d'autre. En outre c'était toujours préférable d'occuper son esprit à l'imagination fertile afin de lui éviter une errance... malvenue.
Soupirant une nouvelle fois à s'en fendre l'âme, Siha ne remarqua même pas le regard mi-inquiet mi-désespéré que lui lança Cyr lorsqu'ils se croisèrent près du feu. Au lieu de ça il se lava les mains et le visage dans une bassine d'eau claire et se prépara à regagner le paisible confort de ses nouveaux quartiers au Bastion, loin de se douter que ses plans allaient être -une fois n'est pas coutume- interrompus par un tumultueux mais fort charmant invité.
« Alors mon ami, quand c'est que tu me racontes ce que t'es devenu depuis ta dernière visite ? »
Donnant une bonne tape dans le dos de Zevran, Rasdir fit preuve de de trop de force à cause de son intarissable enthousiasme. Pendant qu'ils s'étreignaient le guerrier profita pour lui parler sans être entendu des autres elfes qui s'étaient déjà rassemblés pour superviser la nouvelle arrivée. Néanmoins pour certains le visage de l'antivan était déjà connu, et les dalatiens restants se détendirent une fois que le vétéran l'accueillit en frère. Il échapperait au sac sur la tête... pour cette fois.
« T'as pas poussé la chansonnette cette fois , qu'est-ce qui t'arrive ? T'essayais de passer ni vu ni connu pour finir à nouveau couché dans une cabane ? »
Riant de bon cœur le blond ne put s'empêcher de glisser encore une boutade ou deux, bien sûr accompagnées de quelques outrageants haussements de sourcils. Rasdir et le langage corporel... toute une histoire d'amour. Surtout quand il s'agissait de se moquer.
Quoi qu'il en soit ils furent bien vite interrompus par une silhouette longiligne qui surgit d'entre les tentes, comme une bête curieuse soudainement attirée par l'animation générale. Les longs cheveux noirs tombaient en rideau autour de son visage pâle, ses membres athlétiques noyés dans une tunique en tons gris,... et ses deux yeux d'ambre aimantés par la vue de Zevran, tel un poisson ferré au bout d'un hameçon. La parole semblant lui manquer à cause de la surprise, il resta planté là à le regarder, les bras chargés d'une tour de boîtes empilées les unes sur les autres.
« Bon bah je vais sans doute vous laisser, hein... Je m'en voudrais d'interrompre encore une fois. »
Parmi les réfugiés qui avaient rejoint les rangs de Felassan récemment, c'était néanmoins Alice qui le surprenait le plus. En effet à la voir se dépatouiller si naturellement avec les tâches du quotidien, se chamailler en permanence avec Cyr et faire les quatre cent coups avec la complicité de Rasdir, on n'aurait jamais deviné qu'elle n'était pas née Bellanaris. Il soupira, écartant quelques mèches qui s’étaient échappées de sa natte.
Observant silencieusement l'adolescente aider la grisonnante Isehra à étendre le linge, avec la même douce patience de la petite fille qui empêche sa grand-mère de se surmener, Siha sourit. Cette dernière avait beau râler et lancer des traits d'esprit à tort et à travers, elle semblait étonnamment heureuse de sa nouvelle vie, aussi modeste soit-elle. Et tout bien réfléchi devoir se faire passer pour un tortionnaire afin de tirer deux personnes d'affaire resterait à jamais un souvenir douloureux, mais au moins il pouvait se satisfaire de ces sourires insouciants, qui feraient presque passer la vie d'esclave pour un malentendu. Voilà sa principale satisfaction, le sentiment qui rendait le sacrifice de sa fierté, de sa tranquillité et les frayeurs répétées presque acceptables.
Posant son seau vide à côté de l'enclos des hahls qui s'approchèrent aussitôt, l'archiviste finit de les nourrir avant d'éponger son front moite au tissu blanc de sa manche. Parlant aux animaux à voix basse pendant plusieurs minutes, il caressa les bois et les flancs de la peu farouche Ankhil, une femelle dont le ventre proéminent laissait présager un futur heureux événement. Tapotant son museau dans une taquinerie qui leur était propre, le mage finit par enfin s'écarter en traînant les pieds, un peu à regret. Prendre soin des hahls était toujours un peu épuisant, mais tant que le choix lui appartiendrait c'était une tâche qu'il ne laissait à personne d'autre. En outre c'était toujours préférable d'occuper son esprit à l'imagination fertile afin de lui éviter une errance... malvenue.
Soupirant une nouvelle fois à s'en fendre l'âme, Siha ne remarqua même pas le regard mi-inquiet mi-désespéré que lui lança Cyr lorsqu'ils se croisèrent près du feu. Au lieu de ça il se lava les mains et le visage dans une bassine d'eau claire et se prépara à regagner le paisible confort de ses nouveaux quartiers au Bastion, loin de se douter que ses plans allaient être -une fois n'est pas coutume- interrompus par un tumultueux mais fort charmant invité.
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« Alors mon ami, quand c'est que tu me racontes ce que t'es devenu depuis ta dernière visite ? »
Donnant une bonne tape dans le dos de Zevran, Rasdir fit preuve de de trop de force à cause de son intarissable enthousiasme. Pendant qu'ils s'étreignaient le guerrier profita pour lui parler sans être entendu des autres elfes qui s'étaient déjà rassemblés pour superviser la nouvelle arrivée. Néanmoins pour certains le visage de l'antivan était déjà connu, et les dalatiens restants se détendirent une fois que le vétéran l'accueillit en frère. Il échapperait au sac sur la tête... pour cette fois.
« T'as pas poussé la chansonnette cette fois , qu'est-ce qui t'arrive ? T'essayais de passer ni vu ni connu pour finir à nouveau couché dans une cabane ? »
Riant de bon cœur le blond ne put s'empêcher de glisser encore une boutade ou deux, bien sûr accompagnées de quelques outrageants haussements de sourcils. Rasdir et le langage corporel... toute une histoire d'amour. Surtout quand il s'agissait de se moquer.
Quoi qu'il en soit ils furent bien vite interrompus par une silhouette longiligne qui surgit d'entre les tentes, comme une bête curieuse soudainement attirée par l'animation générale. Les longs cheveux noirs tombaient en rideau autour de son visage pâle, ses membres athlétiques noyés dans une tunique en tons gris,... et ses deux yeux d'ambre aimantés par la vue de Zevran, tel un poisson ferré au bout d'un hameçon. La parole semblant lui manquer à cause de la surprise, il resta planté là à le regarder, les bras chargés d'une tour de boîtes empilées les unes sur les autres.
« Bon bah je vais sans doute vous laisser, hein... Je m'en voudrais d'interrompre encore une fois. »
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Arriver aux frontières du clan sans avoir rencontré de chasseurs était relativement exceptionnel. Non pas que les capacités de Zevran soient la raison de ce succès, les chasseurs n’étaient probablement pas en patrouille dans la direction de laquelle il était arrivé et n’éyant pas signalé sa présence outre mesure, il n’avait tout simplement pas attiré l’attention. Ce fût Rasdir qui l’accueillit avec sa bonhomie habituelle. L’Antivan devenait de plus en plus attaché à cet homme à chaque fois qu’il le rencontrait. Il était drôle, ouvert, sans gêne, le genre de personne avec qui Zevran avait toujours su s’entendre. La tape dans le dos le fit basculer légèrement en avant avec un rire.
- « Je pourrais te raconter, mais je serai obligé de te tuer ensuite, ou de te faire tremper dans une sale histoire pour m’assurer que tu tiennes ta langue. » lança-t-il avec un sourire carnassier qui se brisa dans un nouveau rire.
L’accolade qu’ils partagèrent eut pour effet de détendre l’atmosphère, de nombreux elfes s’étaient tourné pour évaluer l’étranger qui avait ainsi trouvé leur clan, mais après quelques murmures, la nouvelle devait avoir fait le tour du clan assez rapidement. Ah les petites communautés où tout le monde se connaît… et où les ragots vont plus vite que les flèches.
Il esquissa un sourire conspirateur à l’évocation de la cabane et se pencha pour lui parler assez bas pour éviter qu’on les entende.
- « Non justement, j’essayais de me faire discret pour voir si je pouvais surprendre un potentiel remplaçant… tu comprends cela fait quelques semaines, s’il m’oublie déjà c’est que je fais quelque chose de travers. »
Il adressa un clin d’oeil au blond et lorsqu’il tourna la tête, Siha était là, sa silhouette élancée s’était arrêtée dans sa course, comme figée par sa présence. Ses yeux d’ambre étaient fixés sur le nordique avec une expression indéchiffrable et l’air d’avoir oublié de respirer. Immédiatement, un sourire bien différent de celui qu’il adressait à Rasdir se dessina sur son visage. Il se passa plusieurs secondes avant que ce dernier ne parle à nouveau, quelque chose à propos de les interrompre auquel Zevran ne fit pas vraiment attention. Il eut vaguement conscience que le chasseur s’en allait cependant et lui adressa un au revoir un peu distrait avant de pivoter vers l’archiviste et de le rejoindre à belles enjambées.
Pendant une demi seconde, il avait eut la pulsion étrange et un peu ridicule d’une envie de courir, mais il la contint pour se contenter de rejoindre le brun d’un pas enthousiaste pas mesuré. Sa joie de revoir le Dalatien ne faisait aucun doute mais il n’allait tout de même pas se mettre à agir comme une écolière. Arrivé à sa hauteur… enfin façon de parler vu qu’il faisait facilement vingt centimètres de moins que lui, il se prit d’un rire joyeux.
- « Et bien Diletto ? Remets-toi, on dirait que tu as vu un fantôme ! C’est pourtant toi qui avait soulevé que je n’avais pas besoin d’une excuse pour venir te voir, non ? »
Il monta sur une souche dans laquelle était planté la sardine qui retenait la voile d’une des aravels du clan et soulagea l’archiviste d’une partie son fardeau. Les caisses empilées dans ses bras contenaient des végétaux, il y reconnaissait quelques herbes de soin et il supposa que le reste devait pouvoir se manger bien qu’il ne puisse pas tout identifier à travers la paroi des boites.
Une petite voix dans sa tête lui chuchota que Siha ne serait peut-être pas aussi à l’aise avec ses démonstrations d’affection au milieu de tout son clan qu’il ne l’avait été lors de leurs sorties en mission ou leurs pérégrination… mais c’était bien connu… il n’écoutait jamais qu’à moitié la petite voix de la raison et alors que ses bras enserraient les boites du dessus de la pile pour en décharger Siha, il tourna la tête et déposa sur sa tempe un baiser rapide qui était probablement passé inaperçu aux éventuels spectateurs.
- « Où est ce que je te pose ça ? J’imagine que tu ne promenais pas tout ça dans le but de leur faire prendre l’air. » acheva-t-il avec un haussement de sourcil comique et un sourire amusé.
Oui décidément, être de retour au près de Siha éloignait un peu les soucis qui lui minait l’esprit quelques heures au par avant. Avec un peu de chance il pourrait rester quelques jours, se vider l’esprit et revenir à ses problèmes avec les idées claires et l’humeur plus légère. Il n’était de tout façon pas à son meilleur pour résoudre les problèmes lorsqu’il tournait en rond dans sa propre tête.
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Les yeux qui regardaient Zevran avaient peut-être la même profondeur dorée de ceux de Siha, mais il était néanmoins clair qu'ils n'étaient pas du tout animés de la même chaleur. De fait Sehariel se figea dans sa surprise pendant de longues secondes, trop choqué pour ébaucher le moindre geste alors que le demi-portion le délestait de plusieurs boîtes. Il n'eut même pas le temps de lui dire de faire attention ou de refuser son aide, que ce fut trop tard. Interdit et estomaqué par l'approche dégoulinante d'affection du sans gêne, il finit quand même par se reprendre sous le baiser sonore qui toucha sa joue. Une grimace plus explicite que n'importe quel discours plissa ses traits jusque là parfaits.
Les yeux ouverts comme des soucoupes et une veine pulsant dangereusement sur sa tempe, le benjamin des jumeaux le dévisagea avec le même déplaisir qu'on découvre une énorme araignée dans un coin de sa tente. Se contrôlant visiblement pour ne pas céder à ses réflexes et exploser de rage, le guerrier tâtonna maladroitement avec ses boîtes et garda son calme par on ne sait quel miracle. Le dalatien trébucha en reculant pour se mettre hors d'atteinte de Zevran. Fort heureusement il ne tomba pas ni ne renversa la pile de casseroles qui étaient rangée non loin. Cependant les biens qu'il transportait ne bénéficièrent pas d'autant de chance et jaillirent d'entre ses bras dans une pluie d'herbes de soins et autres aromates. C'était odorant et plutôt coloré comme chaos, il fallait au moins reconnaître ça.
« Fenedhis, qu'est-ce que... Diletto ? De quels noms d'oiseau tu affubles notre archiviste, haril ?! »
Plusieurs membres du clan levèrent la tête ou s'approchèrent pour voir ce qui se passait, la voix portante de leur maître chasseur s'élevant au fur et à mesure que le choc se dissipait au profit de l'agacement. D'ordinaire les colères de Sehariel étaient aussi rares que la neige aux Tombes d'Émeraude, mais elles étaient aussi des plus mémorables. Quoi qu'il en soit le regard meurtrier qu'il leur lança les découragea d'intervenir et bien assez vite ils retournèrent à leurs occupations, au moins en apparence.
Évidemment ils firent juste en sorte de paraître concentrés, mais ce genre de ragots était assez croustillant pour que presque tous risquent de s'attirer des ennuis. En particulier une jeune femme brune très peu perturbée par l'épisode avait commencé à ramasser les herbes une par une, les déposant entre son bras gauche recouvert de tatouages. Indifférente aux sautes d'humeur et à la présence de Zevran qu'elle avait déjà croisé une paire de fois, Nethari soupira comme si tout ceci était un contretemps aussi fatiguant que prévisible. Et ce n'était pas si loin de la vérité.
« Qu'est-ce que tu fais à nouveau ici, je pensais que vous aviez fini ce que vous aviez à faire à Férelden ? Alice et l'autre fille sont libres, alors pourquoi ? » Son ton retomba de plusieurs crans maintenant qu'il avait attiré l'attention malvenue de ses pairs, mais on pouvait aisément deviner la menace sous-jacente.
« Sehariel... ce que tu as fait tomber ne va pas se ramasser tout seul, tu sais. » Indifférente à l'altercation, l'artisane ne semblait ni inquiète par l'autorité de Seha, ni franchement impressionnée par l'assassin. Ici ils étaient tous égaux, n'en déplaise aux grandes gueules et autres adeptes du contrôle compulsif.
Pour une raison inconnue aux trois présents, cette innocente remontrance fut la goutte d'eau qui fit déborder le vase. Quelqu'un craqua de derrière la tente la plus proche et se mit à pouffer nerveusement, ce qui sonnait étonnamment comme une petite souris chafouine. Tout à coup Sehariel devint écarlate... de rage ou de honte on ne saurait le dire. Finalement le rire déferla en une vague sonore et rauque qui ne pouvait plus être contenue, Rasdir tombant sur le côté en se tenant les flancs. Nethari roula des yeux au ciel, comme si elle avait vu cela venir à des kilomètres.
« Urgh... les hommes. » marmonna-t-elle en dodelinant de la tête, exaspérée. « Où est donc Siha quand on en a besoin pour mettre de l'ordre ? »
« À cette heure du matin, sûrement auprès de la femelle hahl qui doit mettre bas. C'est pas encore l'heure de la soupe... » Entre deux rires le blond s'aventura à glisser un regard sans équivoque vers Zevran, sachant que seul lui pourrait relever ce qu'il avait témoigné dans la cabane de la côte orageuse.
Les yeux ouverts comme des soucoupes et une veine pulsant dangereusement sur sa tempe, le benjamin des jumeaux le dévisagea avec le même déplaisir qu'on découvre une énorme araignée dans un coin de sa tente. Se contrôlant visiblement pour ne pas céder à ses réflexes et exploser de rage, le guerrier tâtonna maladroitement avec ses boîtes et garda son calme par on ne sait quel miracle. Le dalatien trébucha en reculant pour se mettre hors d'atteinte de Zevran. Fort heureusement il ne tomba pas ni ne renversa la pile de casseroles qui étaient rangée non loin. Cependant les biens qu'il transportait ne bénéficièrent pas d'autant de chance et jaillirent d'entre ses bras dans une pluie d'herbes de soins et autres aromates. C'était odorant et plutôt coloré comme chaos, il fallait au moins reconnaître ça.
« Fenedhis, qu'est-ce que... Diletto ? De quels noms d'oiseau tu affubles notre archiviste, haril ?! »
Plusieurs membres du clan levèrent la tête ou s'approchèrent pour voir ce qui se passait, la voix portante de leur maître chasseur s'élevant au fur et à mesure que le choc se dissipait au profit de l'agacement. D'ordinaire les colères de Sehariel étaient aussi rares que la neige aux Tombes d'Émeraude, mais elles étaient aussi des plus mémorables. Quoi qu'il en soit le regard meurtrier qu'il leur lança les découragea d'intervenir et bien assez vite ils retournèrent à leurs occupations, au moins en apparence.
Évidemment ils firent juste en sorte de paraître concentrés, mais ce genre de ragots était assez croustillant pour que presque tous risquent de s'attirer des ennuis. En particulier une jeune femme brune très peu perturbée par l'épisode avait commencé à ramasser les herbes une par une, les déposant entre son bras gauche recouvert de tatouages. Indifférente aux sautes d'humeur et à la présence de Zevran qu'elle avait déjà croisé une paire de fois, Nethari soupira comme si tout ceci était un contretemps aussi fatiguant que prévisible. Et ce n'était pas si loin de la vérité.
« Qu'est-ce que tu fais à nouveau ici, je pensais que vous aviez fini ce que vous aviez à faire à Férelden ? Alice et l'autre fille sont libres, alors pourquoi ? » Son ton retomba de plusieurs crans maintenant qu'il avait attiré l'attention malvenue de ses pairs, mais on pouvait aisément deviner la menace sous-jacente.
« Sehariel... ce que tu as fait tomber ne va pas se ramasser tout seul, tu sais. » Indifférente à l'altercation, l'artisane ne semblait ni inquiète par l'autorité de Seha, ni franchement impressionnée par l'assassin. Ici ils étaient tous égaux, n'en déplaise aux grandes gueules et autres adeptes du contrôle compulsif.
Pour une raison inconnue aux trois présents, cette innocente remontrance fut la goutte d'eau qui fit déborder le vase. Quelqu'un craqua de derrière la tente la plus proche et se mit à pouffer nerveusement, ce qui sonnait étonnamment comme une petite souris chafouine. Tout à coup Sehariel devint écarlate... de rage ou de honte on ne saurait le dire. Finalement le rire déferla en une vague sonore et rauque qui ne pouvait plus être contenue, Rasdir tombant sur le côté en se tenant les flancs. Nethari roula des yeux au ciel, comme si elle avait vu cela venir à des kilomètres.
« Urgh... les hommes. » marmonna-t-elle en dodelinant de la tête, exaspérée. « Où est donc Siha quand on en a besoin pour mettre de l'ordre ? »
« À cette heure du matin, sûrement auprès de la femelle hahl qui doit mettre bas. C'est pas encore l'heure de la soupe... » Entre deux rires le blond s'aventura à glisser un regard sans équivoque vers Zevran, sachant que seul lui pourrait relever ce qu'il avait témoigné dans la cabane de la côte orageuse.
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Zevran n’avait jamais été dupe sur le fait que ses attentions n’étaient pas toujours les bienvenues, il n’était pas exactement le genre de personne à prendre en considération la culture ou l’environnement des personnes sur lesquelles il jetait son dévolu. Il admettait même aisément qu’en quelques occasions il avait fait des faux-pas assez gênants et qu’il lui était même arrivé d’agir de façon vraiment déplacée sans s’en rendre compte. Mais il ne s’était pas attendu à cet air de choc puis de dégoût sur le visage de celui qui quelques semaines plus tôt, l’avait fiévreusement embrassé dans une maison de passe, ou l’avait allongé sur le sol humide d’une cabane de fortune…. Il ne s’était pas non plus attendu au violent recul qu’il esquissa en évitant par chance une pile de casserole qui aurait sûrement sonné l’alerte à tout le campement en tombant.
Un peu abasourdit par ce rejet inattendu, l’Antivan repassa mentalement et le plus rapidement possible ce qu’il savait de la culture dalatienne. Il n’avait aucun souvenir de règles concernant le célibat des archivistes et puis si tel avait été le cas, Siha aurait sûrement été beaucoup plus frileux autour des siens les fois précédentes, après tout ils n’avaient pas toujours été seuls. Arrivait-il à un mauvais moment alors ? Y-avait-il quelqu’un dans le clan qui justifie qu’il le repousse de la sorte pour ne pas se retrouver embarrassé ? Un amant quelconque ? Ou pire un promis ? Avait-il appris quelque chose sur lui, son passé ou son présent, qui l’avait rebuté depuis la dernière fois ?
Mais bientôt le feu d’artifice végétal s’acheva et un autre type de feu d’artifice commença, et dès les premières notes du spectacle… La raison de cette situation étrange s’éclaircit. La voix de cette personne était plus grave, plus sourde… Semblable mais avec quelque chose de plus virile et légèrement plus rugueux que celle de Siha. Soudain, la voix de l’archiviste en question lui revint en tête « Lorsque vous y serez, demandez Sehariel... Il me ressemble à s'y méprendre, vous ne pouvez pas le rater ». Cette phrase, prononcé en pleine fuite, adressée aux filles au milieu des explications qui devaient les mettre à l’abri. C’était un miracle qu’il s’en souvienne, dans l’urgence du moment il avait à peine écouté ces instructions qui ne le concernaient pas.
- « Un jumeau ? » prononça-t-il à mi-voix avant d’éclater d’un rire chaud et sonore, se cramponnant à son chargement pour ne pas qu’il termine à terre avec la part qu’il avait laissé dans les bras du chasseur. « Il avait un jumeau et il n’a rien dit !! ahahah Diletto, sei pieno di sorprese!»
Il se mordit la lèvre pour contrôler son hilarité, pas que la situation soit particulièrement drôle à l’instant, le dénommé Sehariel -s’il se souvenait de son prénom correctement- avait l’air en colère et remis de son choc, avait décidé que dire des insanités en dalatien était une bonne idée. Il connaissait la signification littérale de “fenedhis” et cela manqua de le renvoyer dans un fou rire. Haril par contre…. Aucune idée mais c’était probablement insutlant.
- “Là, là… de quels noms d’oiseau parle-t-on? Jusqu’ici tu es le seul à avoir dérogé au vocabulaire utilisable en bonne compagnie. Sehariel, je présume? Il me semble que Siha a mentionné un nom dans ce genre là lorsque nous nous enfuyons de notre dernière mission mais nous n’avons jamais été vraiment présenté. ” Il se serait bien incliné mais il avait les bras occupés. “Mon nom est Zevran.”
Une elfe aux bras tatoués s’avança, indifférente à la tension ambiante. Soit Sehariel était un habitué des grosses colères soit cette femme était d’un calme à toute épreuve. Dans un cas comme dans l’autre, la menace sous entendue de la voix du jumeau de son Diletto n’était pas passée inaperçue mais il avait tout simplement décidé…. Que ça ne l’intéressait pas. Si Siha était heureux de le voir alors son frère pourrait se mettre sa mauvaise humeur là où la lumière ne passe jamais. Ca lui ferait peut-être du bien d’ailleurs.
Un rire éclata derrière une tente et Zevran adressa un sourire à la fois complice et carnassier à Rasdir. Cette petite enflure l’avait laissé tomber dans le panneau sans rien dire! Et il trouvait ça drôle. Bon pour être tout à fait honnête, l’assassin trouvait la plaisanterie très amusante et il aurait probablement fait la même chose. Cela se paierait plus tard. Il se tourna vers Sehariel à nouveau pour répondre à sa question.
- “Il se trouve que Siha m’a laissé une invitation ouverte. Il m’a encouragé à venir le visiter même sans raison particulière et il se trouve… que je n’ai aucune autre raison d’être ici, que l'envie de le voir.”
Il adressa son sourire le plus lumineux et le plus défiant au chasseur brun, jaugeant ses réactions au cas où il lui faudrait lacher les caisses et courir.
***** Pendant ce temps, à l’autre bout du camps*****
Alice avait assisté médusée à la scène du baiser et à la réaction outrée de Sehariel. Elle s’était immédiatement enfuit vers l’enclos des Hahls avec le sceau d’eau qu’elle portait dans les bras et le posa près de la barrière. Elle monta sur celle-ci pour regarder Siha travailler et lui glissa, un sourire malicieusement dessiné sur sa bouche taquine.
- “Je me demandais une chose…. Est ce que vous aviez dit à Roméro que vous aviez un jumeau avant de l’inviter à revenir au clan?” dit-elle sur le ton le plus innocent qu’elle possédait…. Beaucoup… trop … innocent.
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Entre le ridicule de l'improbable situation et la vue de son meilleur ami qui riait comme un damné en se roulant par terre, Sehariel peinait à ne pas pousser des hurlements dignes d'un spectre venu d'outre-tombe. Contrairement à son aîné il n'avait ni la patience de gérer les pitreries d'étrangers ignorants, et encore moins la volonté de se faire apprécier de quelqu'un qui envahissait son clan, sa famille et son espace vital. Et à ce même titre l'hilarité de Zevran finit de mettre de l'huile sur le feu, telle était la fureur indicible dans laquelle il se trouvait.
Piochant dans les rescapés de l'hécatombe il balança un poireau, puis un radis à la tête de l'insolent. D'ailleurs il n'eut pas le temps de regretter son geste que déjà Nethari le mitraillait d'un regard capable de faire frémir jusqu'aux géants des Tombes Émeraudes. Un deuxième radis armé et prêt à la catapulte, le dalatien s'interrompit néanmoins de peur que son amie prenne soudainement part au combat. C'est qu'il ne tenait pas à lutter contre ses alliés, surtout lorsqu'ils avaient la main lourde et une bonne idée de comment le retrouver en cas de repli stratégique. Merde alors.
« Que signifie 'Diletto' ? » questionna-t-il sans tarder, ignorant les présentations pour en venir à la seule chose qui l'intéressait vraiment.
« Je suis bien curieux de le savoir aussi, tiens... »
Rasdir n'avait pas eu l'intention de s'en mêler mais il fallait bien avouer que l'occasion d'enfin satisfaire sa curiosité était beaucoup trop belle pour ne pas être saisie. Se relevant en chassant la poussière sur son pantalon, le mercenaire haussa les épaules avec un sourire en coin, puis prêta main forte à la jeune femme vu que Sehariel n'y mettait pas vraiment du sien. D'ailleurs ce sobriquet devait être un mystère relativement populaire auprès des Bellanaris, car même l'artisane ramassait ce qui était tombé sans véhémente protestation, outre quelques légitimes accusations marmonnées entre dents. Les commérages c'était mal, mais on avait bien le droit de tendre l'oreille quand la tâche en cours impliquait d'être présente...
Dans l'ensemble l'ambiance était relativement légère grâce au manque de gêne de Rasdir, la neutralité de Nethari et le culot de Zevran, néanmoins les choses changèrent sensiblement dès que ce dernier justifia les raisons de sa présence. Si les autres furent peu surpris de l'explication terre-à-terre qui ressemblait à s'y méprendre au genre de décisions de leur archiviste, Sehariel eut beaucoup plus de mal à avaler la pilule. Il suffisait de regarder son expression pour comprendre que l'inquiétude et la contrariété prenaient le pas sur le reste.
Le moins qu'on puisse dire c'est qu'il n'aimait pas l'idée de voir cet irresponsable rôder autour de Siha, d'autant qu'il ne semblait pas faire d'efforts pour se fondre dans la masse ou faire preuve de retenue. Néanmoins le problème était bien plus sérieux que la seule préservation du bien-être et de l'avenir de sa seule famille. Il pâlit à la sombre direction de ses pensées, mais se reprit en déposant ses armes végétales comme s'il ne les avait pas bazardées sans réfléchir il y a quelques minutes à peine.
D'autre part il ne pouvait ignorer le danger que pouvaient représenter ces allées et venues répétées dans leurs avant-postes, et leurs conséquences sur la sécurité des réfugiés sous la protection des Felassan. Brusquement à nouveau sérieux, le guerrier voyait les raisons de vouloir voir Zevran partir se rallonger de seconde en seconde. L'existence du bastion était encore un secret bien gardé, et pour le bien du plus grand nombre il fallait que cela reste inchangé aussi longtemps que possible. Secouant la tête en se mordant la lèvre, Seha se pencha pour rageusement délester l'antivan de sa charge et déposer le tout par terre, à l'écart de la zone de passage.
Il faudrait qu'il en touche deux mots à leur si sage archiviste, et si nécessaire marteler un peu de bon sens dans sa tête dure. Quoi qu'il puisse bien être en train de se passer avec ce demi-portion -et clairement Sehariel ne voulait pas savoir pour le moment au risque de faire une syncope- Siha ne pourrait pas jouer les autruches éternellement. Ses caprices avaient bien trop d'impact maintenant que plus de gens dépendaient de son autorité, et bien des vies seraient en péril de par son égoïsme.
Et puis franchement pourquoi chercher le réconfort auprès de quelqu'un de si... quelconque et peu digne de confiance, alors qu'il y avait une queue de deux clans et demi prêts à chercher ses faveurs à chaque hahren'al ? Cela n'avait tout bonnement aucun sens !
« T'as faim ? Ma mère a fait du ragoût ! »
Piétinant comme un lion mis en cage, Sehariel ignora l'inacceptable bonhomie avec laquelle Rasdir avait passé un bras autour des épaules de Zevran, pour discuter comme s'il n'en pouvait plus d'attendre des nouvelles. Il aurait le temps de s'occuper de ce traître plus tard, quand ils seraient en privé.
En attendant inutile de continuer une conversation de sourds avec quelqu'un qu'il se ferait bientôt un plaisir de flanquer dehors. Autant prendre les dispositions nécessaires et s'assurer que ce crétin n'avait pas mené des ennemis droit à leur porte, c'était la priorité.
Le maître chasseur était en train de se pincer l'arrête du nez d'un air las, cherchant Jillian du regard, lorsque sa copie conforme déboula en courant, la tunique encore poussiéreuse et une Alice trop souriante sur les talons. Oh non... Il n'allait pas rester pour regarder ça, il risquait d'être pris d'un haut le cœur. Partant à grandes enjambées comme une tornade trop longtemps contenue, Sehariel n'attendit pas de devoir donner des explications. Qu'ils se débrouillent !
« Oh euh... J'ai raté quelque chose ? »
Le ton timide paraissait presque ironique venu d'un érudit, d'autant que sa tenue comme sa posture tenaient plus de l'éleveur que du savant. Siha s'essuya les paumes mouillées sur les cuisses, sa natte se balançant à chaque pas le rapprochant des deux blonds, toujours aussi inséparables.
Les regardant faire pendant une paire de secondes en penchant la tête comme pour mieux attirer leur attention -en vain- il ne se sentait sûrement pas déçu de la lenteur avec laquelle l'assassin semblait le remarquer...
« Rien qui vaille la peine d'être mentionné... » Murmura Nethari, de sorte à n'être entendue que de Siha.
Piochant dans les rescapés de l'hécatombe il balança un poireau, puis un radis à la tête de l'insolent. D'ailleurs il n'eut pas le temps de regretter son geste que déjà Nethari le mitraillait d'un regard capable de faire frémir jusqu'aux géants des Tombes Émeraudes. Un deuxième radis armé et prêt à la catapulte, le dalatien s'interrompit néanmoins de peur que son amie prenne soudainement part au combat. C'est qu'il ne tenait pas à lutter contre ses alliés, surtout lorsqu'ils avaient la main lourde et une bonne idée de comment le retrouver en cas de repli stratégique. Merde alors.
« Que signifie 'Diletto' ? » questionna-t-il sans tarder, ignorant les présentations pour en venir à la seule chose qui l'intéressait vraiment.
« Je suis bien curieux de le savoir aussi, tiens... »
Rasdir n'avait pas eu l'intention de s'en mêler mais il fallait bien avouer que l'occasion d'enfin satisfaire sa curiosité était beaucoup trop belle pour ne pas être saisie. Se relevant en chassant la poussière sur son pantalon, le mercenaire haussa les épaules avec un sourire en coin, puis prêta main forte à la jeune femme vu que Sehariel n'y mettait pas vraiment du sien. D'ailleurs ce sobriquet devait être un mystère relativement populaire auprès des Bellanaris, car même l'artisane ramassait ce qui était tombé sans véhémente protestation, outre quelques légitimes accusations marmonnées entre dents. Les commérages c'était mal, mais on avait bien le droit de tendre l'oreille quand la tâche en cours impliquait d'être présente...
Dans l'ensemble l'ambiance était relativement légère grâce au manque de gêne de Rasdir, la neutralité de Nethari et le culot de Zevran, néanmoins les choses changèrent sensiblement dès que ce dernier justifia les raisons de sa présence. Si les autres furent peu surpris de l'explication terre-à-terre qui ressemblait à s'y méprendre au genre de décisions de leur archiviste, Sehariel eut beaucoup plus de mal à avaler la pilule. Il suffisait de regarder son expression pour comprendre que l'inquiétude et la contrariété prenaient le pas sur le reste.
Le moins qu'on puisse dire c'est qu'il n'aimait pas l'idée de voir cet irresponsable rôder autour de Siha, d'autant qu'il ne semblait pas faire d'efforts pour se fondre dans la masse ou faire preuve de retenue. Néanmoins le problème était bien plus sérieux que la seule préservation du bien-être et de l'avenir de sa seule famille. Il pâlit à la sombre direction de ses pensées, mais se reprit en déposant ses armes végétales comme s'il ne les avait pas bazardées sans réfléchir il y a quelques minutes à peine.
D'autre part il ne pouvait ignorer le danger que pouvaient représenter ces allées et venues répétées dans leurs avant-postes, et leurs conséquences sur la sécurité des réfugiés sous la protection des Felassan. Brusquement à nouveau sérieux, le guerrier voyait les raisons de vouloir voir Zevran partir se rallonger de seconde en seconde. L'existence du bastion était encore un secret bien gardé, et pour le bien du plus grand nombre il fallait que cela reste inchangé aussi longtemps que possible. Secouant la tête en se mordant la lèvre, Seha se pencha pour rageusement délester l'antivan de sa charge et déposer le tout par terre, à l'écart de la zone de passage.
Il faudrait qu'il en touche deux mots à leur si sage archiviste, et si nécessaire marteler un peu de bon sens dans sa tête dure. Quoi qu'il puisse bien être en train de se passer avec ce demi-portion -et clairement Sehariel ne voulait pas savoir pour le moment au risque de faire une syncope- Siha ne pourrait pas jouer les autruches éternellement. Ses caprices avaient bien trop d'impact maintenant que plus de gens dépendaient de son autorité, et bien des vies seraient en péril de par son égoïsme.
Et puis franchement pourquoi chercher le réconfort auprès de quelqu'un de si... quelconque et peu digne de confiance, alors qu'il y avait une queue de deux clans et demi prêts à chercher ses faveurs à chaque hahren'al ? Cela n'avait tout bonnement aucun sens !
« T'as faim ? Ma mère a fait du ragoût ! »
Piétinant comme un lion mis en cage, Sehariel ignora l'inacceptable bonhomie avec laquelle Rasdir avait passé un bras autour des épaules de Zevran, pour discuter comme s'il n'en pouvait plus d'attendre des nouvelles. Il aurait le temps de s'occuper de ce traître plus tard, quand ils seraient en privé.
En attendant inutile de continuer une conversation de sourds avec quelqu'un qu'il se ferait bientôt un plaisir de flanquer dehors. Autant prendre les dispositions nécessaires et s'assurer que ce crétin n'avait pas mené des ennemis droit à leur porte, c'était la priorité.
Le maître chasseur était en train de se pincer l'arrête du nez d'un air las, cherchant Jillian du regard, lorsque sa copie conforme déboula en courant, la tunique encore poussiéreuse et une Alice trop souriante sur les talons. Oh non... Il n'allait pas rester pour regarder ça, il risquait d'être pris d'un haut le cœur. Partant à grandes enjambées comme une tornade trop longtemps contenue, Sehariel n'attendit pas de devoir donner des explications. Qu'ils se débrouillent !
« Oh euh... J'ai raté quelque chose ? »
Le ton timide paraissait presque ironique venu d'un érudit, d'autant que sa tenue comme sa posture tenaient plus de l'éleveur que du savant. Siha s'essuya les paumes mouillées sur les cuisses, sa natte se balançant à chaque pas le rapprochant des deux blonds, toujours aussi inséparables.
Les regardant faire pendant une paire de secondes en penchant la tête comme pour mieux attirer leur attention -en vain- il ne se sentait sûrement pas déçu de la lenteur avec laquelle l'assassin semblait le remarquer...
« Rien qui vaille la peine d'être mentionné... » Murmura Nethari, de sorte à n'être entendue que de Siha.
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Entre Sehariel qui se retenait visiblement d’imploser et Rasdir qui explosait de rire, Zevran avait du mal à garder son sérieux. Pas qu’il ait vraiment fait un effort jusque là mais s’il ne s’arrêtait pas de rire il allait avoir du mal à discuter. Il aurait bien esquivé les lancers de légumes mais il avait présentement les bras chargés. Il utilisa cependant cet handicap à son avantage et leva les caisses pour se protéger le visage en gloussant comme le sale môme qu’il avait toujours été. Son hilarité fût d’autant plus difficile à contenir que Nethari parvint à l’arrêter d’un seul regard.
Lorsque la question du surnom tomba, Zevran fit face à un dilemme cornélien. La situation offrait tellement de possibilités…. Il pouvait proposer d’échanger la signification de Diletto contre celle de myr yeran. Mais… il se doutait que Sehariel devinerait qu’il s’agissait de quelque chose entre Siha et lui et qu’il mente, ou qu’il refuse de lui dire. Pire que tout si myr yeran voulait dire quelque chose ayant des implications qui ne lui plaisaient pas il pouvait aller trouver Siha et le mettre devant le fait accompli. L’antivan renonça assez rapidement à cette option.
Il pouvait également bluffer et lui dire que cela faisait référence à une partie du corps de Siha qu’il ne connaissait pas encore (oui il était d’un naturel optimiste). Cela dit vue les capacités métamorphes de Siha il pouvait prétendre que cela avait rapport avec un changement qu’il opérait pour lui lorsqu’ils étaient intimes… Et puis il repensa à la réaction de Siha devant Wulf et la façon dont il s’était vexé sur des choses que Zevran ne comprenait pas vraiment et ce dernier se décida sur sa dernière option.
Mentir. Trouver une signification atrocement mièvre et tout à fait ridicule pour se moquer de Sehariel. S’il y croyait, Zevran n’arrêterait jamais de rire, s’il n’y croyait pas… il avait les caisses pour arrêter les vols de radis.
- « Diletto ? Oh ça veut dire « petit nug à plumes » c’est une patisserie antivane faite de patte d’amande. C’est outrageusement sucré. » Il tenta de garder le visage le plus convainquant possible.
Il s’attendait évidemment à ce que Rasdir se remette à rire. Si Sehariel tombait dans le panneau peut-être irait-il demander au blond ce que signifiait myr yeran. Pas certain qu’il ne lui mente pas ensuite sur la signification de « diletto » encore une fois mais cela valait le coup d’essayer.
Clairement, Zevran pouvait voir de loin qu’il n’était pas la personne favorite de Sehariel, peu importait, ce n’était pas ce jumeau là qu’il espérait revoir et surtout séduire. Qu’il désapprouve tant qu’il voulait, du moment qu’il ne se mettait pas entre eux. Déchargé de son fardeau et entouré du bras chaleureux de Rasdir, qui mettait un point d’honneur à être ostentatoirement du côté de l’assassin.
- « Plus tard avec plaisir, je vais essayer de trouver Siha, et je me passerai de ton aide cette fois. » lui dit-il avec un clin d’oeil.
Ils regardèrent le chef des chasseurs s’éloigner comme une furie, se demandant s’il avait eut sa dose de Zev pour la journée, lorsque des pas précipités résonnèrent derrière eux. Zevran se tourna pour voir Siha – le vrai cette fois- accourir. Outre la condition quelque peu… rustique… dans laquelle il se trouvait -ce qui n’était pas pour déplaire à l’Antivan, car il ne perdait rien de son charme - il pouvait voir les « différences » entre les jumeaux. Dans ce qu’is dégageaient évidemment mais aussi… il y avait quelque chose de plus doux chez Siha, certainement parce qu’en tant que mage il passait plus de temps à étudier qu’à courir les bois. Il ferait plus attention à l’avenir.
Mais ce qui raviva véritablement le sourire de l’assassin et le fit se dégager de la prise amicale de Rasdir fur le son de la voix de l’archiviste. La réponse de Nethari déclencha un nouvel accès de rire. Il pouvait voir la diplomatie de la remarque mais elle était bien inutile avec lui.
- « Ah Diletto, n’écoute pas ton amie. Tu as en effet loupé une scène d’anthologie dans l’histoire de ton clan. Vois tu, n’étant pas au courant que tu avais un jumeau et ne soupçonnant en aucune façon son existence… Je suis arrivé il y a quelques minutes et , brûlant de l'envie de te retrouver, de te manifester toute la fougue de mon désir…. Je t’ai embrassé….. Et il s’est avéré que tu m’a hurlé dessus d’une voix grave et outrée qui n’avait absolument rien à voir avec nos précédents échanges. Ainsi suis-je instruit de l’existence de Sehariel, et de son talent pour lancer les poireaux. »
Il soupira, laissant l’information faire son effet puis se mit en mouvement.
- « Je ne peux pas reprendre ce que j’ai donné mais je peux au moins rétablir l’équilibre en t’administrant le même traitement. »
Il cloua Siha du regard, son expression reflétant un désir profond. Il s’approcha de lui, puis se fendit d’un sourire malicieux et l’embrassa affectueusement sur la tempe… comme il l’avait avec Sehariel.
- « Je suis heureux de te revoir, Diletto. »
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Évidemment comme il était prévisible la pluie de légumes se fit plus drue suite à une grimace outrée et nombre d'exclamations peu amicales en dalatien. Plusieurs tubercules et autres oignons tombèrent droit sur la tête de Zevran par-dessus son bouclier improvisé dans un « bonk » caractéristique ; Sehariel prouvant sa fureur au moins autant que son statut de tireur d'élite. Sans merci ni répit, il mitrailla de plus belle pour effacer l'affront de la moquerie, jusqu'à ce que le gâchis d'une tomate tombée par terre et le regard meurtrier de Nethari le ramènent à la raison. Pour l'instant.
« Ridicule ! Toi au même titre que tes conneries, étranger. T'en approches pas. » Dit-il en pointant furieusement un index, agacé par la ténacité de son adversaire du moment. Puis il s'éclipsa à grandes enjambées sans se retourner, parti à la recherche de Jillian.
L'artisane ouvrit la bouche pour rétorquer quelque chose, mais retint finalement sa cinglante remarque. Inutile d'envenimer les choses, autrement ces deux-là n'arrêteraient jamais de jouer aux gamins avec la nourriture du clan. Essayant tant bien que mal de rattraper le coup, elle haussa des épaules en minimisant la mésaventure, bien que la constellation d'herbes et autres bien en dehors de leurs boîtes trahissent le duel implacable qui venait d'avoir lieu sous ses yeux. Soupirant d'exaspération face à l'innocente arrivée de l'archiviste, Nethari s'écarta en dodelinant de la tête, les laissant à leurs affaires quoi que ça puisse être.
Hélas sa tentative de traiter l'affaire discrètement fut balancée aux orties par la langue de chiffon de Zevran, qui vendit la mèche dès que l'occasion de faire son intéressant se profila. Et Rasdir ne tarda pas à suivre le mouvement chaotique, comme il savait si bien le faire même quand personne ne lui avait rien demandé.
« Tiens, voilà le petit nug à poil. » Remarqua finalement Rasdir, qui se retourna en emmenant Zevran dans son mouvement. Il le lâcha.
« À plumes ! » Corrigea-t-elle au loin.
« Oh, mais quelle différence ? »
Le guerrier haussa les épaules et se craqua les phalanges, apparemment on ne peut plus imperméable aux critiques et autres regards lourds de reproches. D'un autre côté Siha débarquait après avoir raté un épisode, ce qui ne l'aidait pas à se remettre de l'effet de surprise. C'est à croire que malgré les visites successives il ne n'était toujours pas habitué à voir une personne extérieure venir le visiter aussi librement. Et c'était bien entendu la seule raison de son cœur battant, en même temps que la course qu'il avait piquée depuis l'enclos des hahls.
Néanmoins le récit d'une énième épopée antivane en terres exotiques eut pour don de faire Siha blêmir de plus en plus au fur et à mesure que les facteurs aggravants se cumulaient à vue d’œil. Voilà comment saboter la première rencontre entre son... complice et son frère poule. Lâchant une grande inspiration qu'il n'avait pas réalisé avoir retenue, le mage frotta nerveusement les paumes de ses mains contre son pantalon.
« Pourquoi ça n'arrive qu'à moi... ? J'aurais dû te dire que j'avais un petit frère qui me ressemble. Mais c'est vrai que nos voyages n'ont pas été très propices à ce genre de discussions. »
Joli euphémisme que d'appeler ça une 'ressemblance', mais pour sa défense les pensées se bousculaient et s'entrechoquaient sous son front couvert de terre. Pliant instinctivement un peu le genou, l'archiviste facilita cependant la vie à l'assassin autant que possible sans le vexer, récoltant un sourire amusé de Rasdir, qui observait la scène aux premières loges.
« Sont-ils pas mignons, les oisillons... » Mumura-t-il en rangeant les boîtes qui étaient tombées en piles nettes, maintenant que la catastrophe avait été rattrapée.
« Tu devais pas distribuer le ragoût, toi ? » Feula Siha avec une pointe acide, ses sourcils froncés lui donnant un air sévère rapidement évincé par ses cheveux en bataille et son apparence loin d'être parfaite. « Tu as fait bon voyage depuis... depuis là d'où tu viens ? »
Confus, il avait voulu faire la conversation mais avait vite réalisé que comme d'habitude il n'avait aucune idée d'où était allé Zevran et quelles affaires l'avaient retenu. L'exécution de contrats, la subtilisation de biens, ou Mythal sait quelle autre chose encore ? Sa main se posa sur l'épaule du nordique avant de glisser doucement le long de son avant-bras. Il baissa d'un ton.
« Ravi de voir que tu vas bien. Je ne peux pas m'empêcher de m'inquiéter quand je vois avec quelle facilité tu te jettes dans les ennuis. »
Puis enfin il l'étreignit contre lui, ne le serrant pas trop près étant donné la crasse qui le recouvrait. Néanmoins il ne put s'empêcher de poser le menton sur le haute du crâne de son vis à vis l'espace d'un instant, inspirant son odeur tout en ne trahissant pas trop son attitude aux potentiels regards curieux. Pour ce que ça pouvait bien valoir, après une énième entrée en matière foireuse.
« Quel bon vent t'amène ? » Il le relâcha, un léger sourire aux lèvres.
« Ridicule ! Toi au même titre que tes conneries, étranger. T'en approches pas. » Dit-il en pointant furieusement un index, agacé par la ténacité de son adversaire du moment. Puis il s'éclipsa à grandes enjambées sans se retourner, parti à la recherche de Jillian.
L'artisane ouvrit la bouche pour rétorquer quelque chose, mais retint finalement sa cinglante remarque. Inutile d'envenimer les choses, autrement ces deux-là n'arrêteraient jamais de jouer aux gamins avec la nourriture du clan. Essayant tant bien que mal de rattraper le coup, elle haussa des épaules en minimisant la mésaventure, bien que la constellation d'herbes et autres bien en dehors de leurs boîtes trahissent le duel implacable qui venait d'avoir lieu sous ses yeux. Soupirant d'exaspération face à l'innocente arrivée de l'archiviste, Nethari s'écarta en dodelinant de la tête, les laissant à leurs affaires quoi que ça puisse être.
Hélas sa tentative de traiter l'affaire discrètement fut balancée aux orties par la langue de chiffon de Zevran, qui vendit la mèche dès que l'occasion de faire son intéressant se profila. Et Rasdir ne tarda pas à suivre le mouvement chaotique, comme il savait si bien le faire même quand personne ne lui avait rien demandé.
« Tiens, voilà le petit nug à poil. » Remarqua finalement Rasdir, qui se retourna en emmenant Zevran dans son mouvement. Il le lâcha.
« À plumes ! » Corrigea-t-elle au loin.
« Oh, mais quelle différence ? »
Le guerrier haussa les épaules et se craqua les phalanges, apparemment on ne peut plus imperméable aux critiques et autres regards lourds de reproches. D'un autre côté Siha débarquait après avoir raté un épisode, ce qui ne l'aidait pas à se remettre de l'effet de surprise. C'est à croire que malgré les visites successives il ne n'était toujours pas habitué à voir une personne extérieure venir le visiter aussi librement. Et c'était bien entendu la seule raison de son cœur battant, en même temps que la course qu'il avait piquée depuis l'enclos des hahls.
Néanmoins le récit d'une énième épopée antivane en terres exotiques eut pour don de faire Siha blêmir de plus en plus au fur et à mesure que les facteurs aggravants se cumulaient à vue d’œil. Voilà comment saboter la première rencontre entre son... complice et son frère poule. Lâchant une grande inspiration qu'il n'avait pas réalisé avoir retenue, le mage frotta nerveusement les paumes de ses mains contre son pantalon.
« Pourquoi ça n'arrive qu'à moi... ? J'aurais dû te dire que j'avais un petit frère qui me ressemble. Mais c'est vrai que nos voyages n'ont pas été très propices à ce genre de discussions. »
Joli euphémisme que d'appeler ça une 'ressemblance', mais pour sa défense les pensées se bousculaient et s'entrechoquaient sous son front couvert de terre. Pliant instinctivement un peu le genou, l'archiviste facilita cependant la vie à l'assassin autant que possible sans le vexer, récoltant un sourire amusé de Rasdir, qui observait la scène aux premières loges.
« Sont-ils pas mignons, les oisillons... » Mumura-t-il en rangeant les boîtes qui étaient tombées en piles nettes, maintenant que la catastrophe avait été rattrapée.
« Tu devais pas distribuer le ragoût, toi ? » Feula Siha avec une pointe acide, ses sourcils froncés lui donnant un air sévère rapidement évincé par ses cheveux en bataille et son apparence loin d'être parfaite. « Tu as fait bon voyage depuis... depuis là d'où tu viens ? »
Confus, il avait voulu faire la conversation mais avait vite réalisé que comme d'habitude il n'avait aucune idée d'où était allé Zevran et quelles affaires l'avaient retenu. L'exécution de contrats, la subtilisation de biens, ou Mythal sait quelle autre chose encore ? Sa main se posa sur l'épaule du nordique avant de glisser doucement le long de son avant-bras. Il baissa d'un ton.
« Ravi de voir que tu vas bien. Je ne peux pas m'empêcher de m'inquiéter quand je vois avec quelle facilité tu te jettes dans les ennuis. »
Puis enfin il l'étreignit contre lui, ne le serrant pas trop près étant donné la crasse qui le recouvrait. Néanmoins il ne put s'empêcher de poser le menton sur le haute du crâne de son vis à vis l'espace d'un instant, inspirant son odeur tout en ne trahissant pas trop son attitude aux potentiels regards curieux. Pour ce que ça pouvait bien valoir, après une énième entrée en matière foireuse.
« Quel bon vent t'amène ? » Il le relâcha, un léger sourire aux lèvres.
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Let us Dance
Les couleurs quittèrent temporairement le visage de l’archiviste alors qu’il écoutait le récit de la rencontre entre son frère et l’assassin qui lui servait de complice. Pas que Zevran se soit attendu à le voir éclater de rire mais tout de même, il n’avait pas pensé que cela l’alarmerait autant. Il feint la nonchalance en haussant les épaules.
- « Ce n’est pas grave, la moitié du chemin est fait, moi je l’aime bien. Il a…. un côté … volcanique ! c’est ça, volcanique… toute cette énergie, cette fougue. Aaaah il s’entendrait bien avec les Dalatiens qu’on a dans le nord. »
Il se fendit d’un rire chaud à l’évocation de leur ressemblance… en effet pour lui ressembler, il lui ressemblait !
- « Ah, quand il s’est mis à parler je me suis souvenu que tu avais dit quelque chose à propos d’un certain Sehariel à Alice et Myssa. Nous étions un peu dans l’urgence et tu ne me parlais pas à moi mais si j’avais fait plus attention cela m’aurait peu-être frappé plus tôt. De toute façon les présentations sont faites, il n’a pas l’air de beaucoup m’apprécier mais ce n’est pas lui que je viens voir de toute façon…. » Il eut un petit sourire en coin. « Que veut dire haril ? »
Il apprécia que Siha l’aide un peu en se baissant, cet elfe était beaucoup trop grand à son goût. Comment voulez vous surprendre quelqu’un avec un baiser s’il mesurait presque vingt centimètres de plus que vous. Zevran savait qu’il n’avait pas un grand gabarit, mais pour sa ligne de métier c’était plutôt un avantage et d’une façon générale les elfes étaient plus petits que les humains… C’était à se demander ce que les dalatiens avaient donné à manger aux jumeaux pour qu’il finissent aussi grand que des arbres.
Il adressa un regard équivoque à Rasdir pour lui signifier qu’il était de trop maintenant et attendit qu’il s’en aille. En regardant autour de lui, il remarqua qu’Alice était un peu plus loin et semblait attendre Rasdir en se mordant la lèvre d’impatience. Ah, il n’allait jamais cesser d’entendre parler de cette histoire maintenant, il en était sûr. Si ces deux là étaient amis -ce qui ne l’étonnait guère- alors les ragots avaient de longs jours de prospérité devant eux. Il se tourna vers Siha alors que ce dernier lui parlait à nouveau.
- « Ahah Diletto, je crains que cette fois tu ne te sois inquiété pour rien, lorsque nous nous somme quittés je faisais route vers le lac Celestine. Une amie à moi m’a récemment révélé qu’elle avait fait partie des Corbeaux, nous avions tous les deux besoin d’en parler et nous sommes tombés d’accord que le faire par écrit serait une très mauvaise idée. Nous avions raison, cette conversation a été…. Intense à sa manière. » Un rictus un peu ironique se dessina sur ses lèvres. « J’avais des soupçons depuis longtemps mais elle ne porte pas son ancienne appartenance en étendard comme je le fais. Je n’avais pas de moyen d’en être sûr jusqu’à maintenant. Cela fait du bien de voir que je ne suis pas le seul à avoir survécu après avoir … «démissionné » si on peut dire. »
Sa main vint couvrir doucement celle qui courrait le long de son bras. Le toucher de Siha était chaud, accueillant et bien que jusqu’ici les deux elfes n’aient pas véritablement partagé leur couche au sens cantique du terme, intime. Cette pensée le distrait quelques secondes avant qu’il se concentre sur l’archiviste.
- « Rien en particulier à vrai dire. Tu avais suggéré que je n’avais pas besoin de prétexte pour venir te voir, me voilà. J’avais besoin de me changer les idées et de voir des visages familiers, et le tien est un des plus agréables que je connaisse. » roucoula-t-il presque en caressant la main toujours posée sur son bras. « Et toi ? J’imagine que rentrer dans ton clan a dû te faire du bien après toutes ces péripéties. Alice ne t’as pas donné trop de fil à retordre depuis qu’elle vous a rejoint ? »
Un coups d’oeil dans sa direction lui indiqua que Rasdir devait être en train de tout lui raconter car elle pouffait de rire en essayant de se cacher la bouche avec la main. Cela ne l’étonnait pas qu’ils se soient trouvés ces deux là. Il se demanda cependant ce qui était advenu de l’autre fille.
- « La rouquine est restée aussi ? Quel était son nom déjà ? Myssa ? »
Il se souvenait essentiellement de son attitude apeurée et de son manque de réaction. Il imaginait que la chaleur d’un clan aurait pu être une bonne option pour elle mais quelque chose en lui lui disait qu’elle n’était pas là. Il faudrait attendre le récit de Siha pour en être sûr.
Invité
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Évidemment avec la sévérité de Sehariel et le naturel extravaguant de leur visiteur, Siha avait anticipé que les « incidents diplomatiques » puissent survenir. À vrai dire étant données les situations dans lesquelles il avaient tendance à se mettre avec -ou à cause de l'antivan- c'était sans doute un miracle que ce genre de choses ne se soit pas produite plus tôt. Peut-être avait-il juste eu la chance de ne pas voir les chemins de ces personnes si différentes se croiser auparavant. Peut-être Mythal avait-elle simplement décidé de lui laisser un moment de répit, entre deux épisodes de honte profonde.
D'un autre côté s'il aurait autrement ri de bon cœur avec eux de ce malentendu sans grandes conséquences, l'archiviste avait trop peur de voir les choses tourner au vinaigre pour se laisser aller pour le moment. Parce que pour une raison qui lui échappait encore, il lui était fort important de que cela se passe bien et que les visites impromptues de l'assassin fassent le moins de vagues possibles parmi la communauté. Il aurait aimé le voir accepté, mais hélas ce souhait était un funambule dansant en ce moment même sur la corde raide.
En outre c'était très difficile de faire la séparation entre sa vie privée et les diverses charges endossées, d'autant que la pression était devenue beaucoup plus forte après l'établissement de Varethan et l'accueil de sa population grandissante. Tout à coup sa meute avait facilement triplé en nombre et ce n'était pas vraiment facile à gérer au quotidien, même avec l'aide d'acharnés tels que Jillian et Sehariel. Mais s'il y avait bien une conclusion à tirer, c'est que la présence de Zevran était au pire une distraction tombée du ciel, au mieux une occasion de détente fort méritée... au diable les mauvaises langues.
Souriant finalement aux inepties du blond, Siha se détendit petit à petit, réalisant que l'altercation n'était pas sérieuse. Autrement ils en seraient venus aux mains plutôt qu'aux... légumes. Soupirant d'un indicible soulagement, il se prépara à écouter la version longue du voyage, pas dérangé une seconde par cette perspective. Avec un peu de chance il pourrait rigoler en voyant quelqu'un d'autre que lui mis en mauvaise posture, comme il semblait toujours arriver dans ce cas-là. Prenant place sur une grosse souche qui était installée comme siège près du feu, il fit une place à ses côtés et posa les coudes sur les genoux, penché en avant.
La curiosité prit le dessus alors que pour la première fois Zevran faisait mention à quelqu'un d'assez proche pour être considéré comme une amie. À l'exception de Wulf Cousland, en tout cas. Ah, il n'en revenait toujours pas que le monde soit si petit et que la Mésange qu'il avait spontanément engagée il y a quelques semaines soit en réalité un des compagnons d'un tel héros...
Animant de temps à autre son écoute de signes de tête ou de haussements de sourcils en réaction, Siha ne savait pas vraiment quoi faire de cette révélation. Les sujets personnels étaient abordés assez rarement pour que ce genre de conversation soit peu ordinaire, et en même temps il lui sembla lire bien des non dits dans les prunelles mordorées de son complice. Lui offrant un sourire ambigu, il n'osa pas creuser plus loin que ce qu'il était prêt à lui dire de son propre chef.
Les dalatiens n'étaient pas très familiers avec les Corbeaux et même ses années de voyage ne lui avaient pas appris grand chose de fiable. Néanmoins les clans qui s'étaient aventurés aussi loin dans le nord avaient toujours transmis leur farouche méfiance envers l'organisation à l'influence tentaculaire à Antiva, ainsi que de folles rumeurs sur l'enlèvement d'enfants elfes. Le moins qu'on puisse dire c'est que le fruit de ses connaissances et de son imagination ne lui en donnait pas une bonne image, et ce que lui racontait Zevran n'arrangeait pas les choses. Heureusement qu'il n'en faisait plus partie...
« De ce que j'ai pu voir, tu as un don de te fourrer dans les embrouilles où que tu ailles, mir yeran. Il est normal que je me soucie de te revoir en un seul morceau, quand je ne suis pas là pour surveiller ou recoudre tes blessures. S'il t'arrivait quelque chose, imagine quel gâchis ce serait... » Il lui glissa une œillade espiègle puis haussa les épaules en s'humidifiant les lèvres.
La tentative de flirt lui fit néanmoins lever des yeux au ciel, comme s'il avait déjà entendu ce genre de compliments des dizaines de fois. Et ce n'en était pas si loin... C'est que les dalatiens manquaient parfois d'imagination quand il s'agissait de séduire, comme si les techniques d'approche avaient été passées de génération en génération depuis des temps immémoriaux.
Par ailleurs Siha ne se déroba ni au toucher ni à l'atmosphère intime qui semblait si aisément se réinstaller entre eux, en une tenace mais chaude habitude. La vérité c'est que l'insistance et le charme sans gêne du nordique avaient tendance à faire le pas qu'il n'osait pas la plupart du temps.
« Te changer les idées, est-il arrivé quelque chose de déplaisant avec ton amie ? » Penchant la tête sur le côté, il ne put s'empêcher de demander.
Cela dit le sujet d'Alice le fit regarder dans la direction de la concernée, qui complotait quelque chose en papotant avec Rasdir. Ils n'étaient pas à portée d'oreille, mais les regards suspects et les rires qu'ils échangeaient lui donnaient la claire impression d'être observé en permanence.
« Oui ça m'a fait du bien de retrouver l'aravel après toutes ces... aventures. Je ne suis toujours pas friand des milieux urbains, même si y aller est parfois inévitable quand on veut que les choses avancent. » Le bon se mêlait au moins bon avec tout ce qui s'était passé, et retrouver les siens l'avait aidé à se ressourcer... jusqu'à ce qu'il se rende compte des expectatives encore plus nombreuses. Il déglutit un peu nerveusement. « Pour être honnête je suis encore tenté de disparaître dans la nature sous forme animale pendant plusieurs jours d'affilée. J'avais l'habitude de beaucoup faire ça, enfant. Eluthel me collait toujours de sévères punitions au retour, mais je ne l'ai jamais vraiment regretté... Sauf peut-être la fois où j'ai été de corvée latrines pendant un mois. Ça c'était vraiment vache. »
Un sourire mélancolique se dessina sur ses lèvres fines, pendant qu'une grosse mèche sombre lui tombait sur le visage. Sa natte battait de l'aile de tous les côtés, et il était actuellement trop paresseux pour arranger ça. Il fallait bien que Zevran finisse par découvrir son vrai jour, celui du manuel loin du glamour et de l'élégance citadins.
« Alice ? Elle se porte comme un charme, comme tu peux le voir. J'ai rarement vu quelqu'un s'adapter aussi vite parmi les nôtres, et je compte aussi les transferts par mariage ou surpopulation. Je crois qu'elle a eu un peu peur au début et a cherché à râler sur tout ce qu'il est possible pour le cacher, mais une fois qu'elle a compris que je ne suis pas un 'membre d'une secte envoyé pour la séquestrer', les choses ont été plus faciles.
Elle a toujours une frousse bleue de Sehariel, mais je crois que c'est parce qu'elle a un faible pour lui. Ou peut-être qu'elle le déteste sincèrement, difficile à dire à cet âge là. Puis Rasdir a décidé de l'adopter et l'engager comme acolyte pour ses farces habituelles... et ce fut comme si elle était aussitôt rebaptisée Bellanaris. »
Un petit rire rauque quitta sa gorge... jusqu'à ce qu'il entende le nom de Myssa. Un mélange de culpabilité et de tristesse l'assaillit alors au souvenir de leur rencontre, mais aussi d'une certaine frustration face à son départ. Difficile de se faire une raison mais il le fallait pourtant : il ne pouvait pas rendre tout le monde heureux, et il était déjà fabuleux qu'il ait pu lui offrir la liberté. Maintenant il appartenait à la jeune femme de décider quoi faire de sa nouvelle vie.
« Elle est partie sans prévenir. Sans dire au revoir ou merci. Un beau matin quand je me suis levé on m'a appris qu'elle a pris ses affaires, saccagé la tente voisine à la recherche d'objets de valeur, et a disparu dans la nuit. » Son regard se perdit au loin vers l'immense cime des arbres, et le ciel qu'on devinait parfois entre les plus hautes branches.
« C'est vraiment regrettable que les choses se terminent comme ça, mais je ne peux malheureusement pas dire que je suis surpris. Ce n'est pas la première fois qu'un non dalatien me fait un coup pareil, et je ne me fais pas d'illusions, ce ne sera sans doute pas la dernière. » Il semblait se parler à lui-même autant qu'à Zevran, comme s'il cherchait à se convaincre de ses paroles. « Dommage. Personne ne la retenait et j'aurais pu l'aider davantage,... pour cela il lui aurait suffi de demander. Enfin... j'ai fait ce que je pouvais en lui offrant une chance de choisir son sort librement. Je dois m'en satisfaire même si je n'approuve pas le chemin qu'elle a choisi. »
D'un autre côté s'il aurait autrement ri de bon cœur avec eux de ce malentendu sans grandes conséquences, l'archiviste avait trop peur de voir les choses tourner au vinaigre pour se laisser aller pour le moment. Parce que pour une raison qui lui échappait encore, il lui était fort important de que cela se passe bien et que les visites impromptues de l'assassin fassent le moins de vagues possibles parmi la communauté. Il aurait aimé le voir accepté, mais hélas ce souhait était un funambule dansant en ce moment même sur la corde raide.
En outre c'était très difficile de faire la séparation entre sa vie privée et les diverses charges endossées, d'autant que la pression était devenue beaucoup plus forte après l'établissement de Varethan et l'accueil de sa population grandissante. Tout à coup sa meute avait facilement triplé en nombre et ce n'était pas vraiment facile à gérer au quotidien, même avec l'aide d'acharnés tels que Jillian et Sehariel. Mais s'il y avait bien une conclusion à tirer, c'est que la présence de Zevran était au pire une distraction tombée du ciel, au mieux une occasion de détente fort méritée... au diable les mauvaises langues.
Souriant finalement aux inepties du blond, Siha se détendit petit à petit, réalisant que l'altercation n'était pas sérieuse. Autrement ils en seraient venus aux mains plutôt qu'aux... légumes. Soupirant d'un indicible soulagement, il se prépara à écouter la version longue du voyage, pas dérangé une seconde par cette perspective. Avec un peu de chance il pourrait rigoler en voyant quelqu'un d'autre que lui mis en mauvaise posture, comme il semblait toujours arriver dans ce cas-là. Prenant place sur une grosse souche qui était installée comme siège près du feu, il fit une place à ses côtés et posa les coudes sur les genoux, penché en avant.
La curiosité prit le dessus alors que pour la première fois Zevran faisait mention à quelqu'un d'assez proche pour être considéré comme une amie. À l'exception de Wulf Cousland, en tout cas. Ah, il n'en revenait toujours pas que le monde soit si petit et que la Mésange qu'il avait spontanément engagée il y a quelques semaines soit en réalité un des compagnons d'un tel héros...
Animant de temps à autre son écoute de signes de tête ou de haussements de sourcils en réaction, Siha ne savait pas vraiment quoi faire de cette révélation. Les sujets personnels étaient abordés assez rarement pour que ce genre de conversation soit peu ordinaire, et en même temps il lui sembla lire bien des non dits dans les prunelles mordorées de son complice. Lui offrant un sourire ambigu, il n'osa pas creuser plus loin que ce qu'il était prêt à lui dire de son propre chef.
Les dalatiens n'étaient pas très familiers avec les Corbeaux et même ses années de voyage ne lui avaient pas appris grand chose de fiable. Néanmoins les clans qui s'étaient aventurés aussi loin dans le nord avaient toujours transmis leur farouche méfiance envers l'organisation à l'influence tentaculaire à Antiva, ainsi que de folles rumeurs sur l'enlèvement d'enfants elfes. Le moins qu'on puisse dire c'est que le fruit de ses connaissances et de son imagination ne lui en donnait pas une bonne image, et ce que lui racontait Zevran n'arrangeait pas les choses. Heureusement qu'il n'en faisait plus partie...
« De ce que j'ai pu voir, tu as un don de te fourrer dans les embrouilles où que tu ailles, mir yeran. Il est normal que je me soucie de te revoir en un seul morceau, quand je ne suis pas là pour surveiller ou recoudre tes blessures. S'il t'arrivait quelque chose, imagine quel gâchis ce serait... » Il lui glissa une œillade espiègle puis haussa les épaules en s'humidifiant les lèvres.
La tentative de flirt lui fit néanmoins lever des yeux au ciel, comme s'il avait déjà entendu ce genre de compliments des dizaines de fois. Et ce n'en était pas si loin... C'est que les dalatiens manquaient parfois d'imagination quand il s'agissait de séduire, comme si les techniques d'approche avaient été passées de génération en génération depuis des temps immémoriaux.
Par ailleurs Siha ne se déroba ni au toucher ni à l'atmosphère intime qui semblait si aisément se réinstaller entre eux, en une tenace mais chaude habitude. La vérité c'est que l'insistance et le charme sans gêne du nordique avaient tendance à faire le pas qu'il n'osait pas la plupart du temps.
« Te changer les idées, est-il arrivé quelque chose de déplaisant avec ton amie ? » Penchant la tête sur le côté, il ne put s'empêcher de demander.
Cela dit le sujet d'Alice le fit regarder dans la direction de la concernée, qui complotait quelque chose en papotant avec Rasdir. Ils n'étaient pas à portée d'oreille, mais les regards suspects et les rires qu'ils échangeaient lui donnaient la claire impression d'être observé en permanence.
« Oui ça m'a fait du bien de retrouver l'aravel après toutes ces... aventures. Je ne suis toujours pas friand des milieux urbains, même si y aller est parfois inévitable quand on veut que les choses avancent. » Le bon se mêlait au moins bon avec tout ce qui s'était passé, et retrouver les siens l'avait aidé à se ressourcer... jusqu'à ce qu'il se rende compte des expectatives encore plus nombreuses. Il déglutit un peu nerveusement. « Pour être honnête je suis encore tenté de disparaître dans la nature sous forme animale pendant plusieurs jours d'affilée. J'avais l'habitude de beaucoup faire ça, enfant. Eluthel me collait toujours de sévères punitions au retour, mais je ne l'ai jamais vraiment regretté... Sauf peut-être la fois où j'ai été de corvée latrines pendant un mois. Ça c'était vraiment vache. »
Un sourire mélancolique se dessina sur ses lèvres fines, pendant qu'une grosse mèche sombre lui tombait sur le visage. Sa natte battait de l'aile de tous les côtés, et il était actuellement trop paresseux pour arranger ça. Il fallait bien que Zevran finisse par découvrir son vrai jour, celui du manuel loin du glamour et de l'élégance citadins.
« Alice ? Elle se porte comme un charme, comme tu peux le voir. J'ai rarement vu quelqu'un s'adapter aussi vite parmi les nôtres, et je compte aussi les transferts par mariage ou surpopulation. Je crois qu'elle a eu un peu peur au début et a cherché à râler sur tout ce qu'il est possible pour le cacher, mais une fois qu'elle a compris que je ne suis pas un 'membre d'une secte envoyé pour la séquestrer', les choses ont été plus faciles.
Elle a toujours une frousse bleue de Sehariel, mais je crois que c'est parce qu'elle a un faible pour lui. Ou peut-être qu'elle le déteste sincèrement, difficile à dire à cet âge là. Puis Rasdir a décidé de l'adopter et l'engager comme acolyte pour ses farces habituelles... et ce fut comme si elle était aussitôt rebaptisée Bellanaris. »
Un petit rire rauque quitta sa gorge... jusqu'à ce qu'il entende le nom de Myssa. Un mélange de culpabilité et de tristesse l'assaillit alors au souvenir de leur rencontre, mais aussi d'une certaine frustration face à son départ. Difficile de se faire une raison mais il le fallait pourtant : il ne pouvait pas rendre tout le monde heureux, et il était déjà fabuleux qu'il ait pu lui offrir la liberté. Maintenant il appartenait à la jeune femme de décider quoi faire de sa nouvelle vie.
« Elle est partie sans prévenir. Sans dire au revoir ou merci. Un beau matin quand je me suis levé on m'a appris qu'elle a pris ses affaires, saccagé la tente voisine à la recherche d'objets de valeur, et a disparu dans la nuit. » Son regard se perdit au loin vers l'immense cime des arbres, et le ciel qu'on devinait parfois entre les plus hautes branches.
« C'est vraiment regrettable que les choses se terminent comme ça, mais je ne peux malheureusement pas dire que je suis surpris. Ce n'est pas la première fois qu'un non dalatien me fait un coup pareil, et je ne me fais pas d'illusions, ce ne sera sans doute pas la dernière. » Il semblait se parler à lui-même autant qu'à Zevran, comme s'il cherchait à se convaincre de ses paroles. « Dommage. Personne ne la retenait et j'aurais pu l'aider davantage,... pour cela il lui aurait suffi de demander. Enfin... j'ai fait ce que je pouvais en lui offrant une chance de choisir son sort librement. Je dois m'en satisfaire même si je n'approuve pas le chemin qu'elle a choisi. »
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