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Dim 6 Mai 2018 - 19:50

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And she will know no fear of death

D'un coup de genou rapide, Emery brisa le cou du coupe-jarrets. Le craquement sonore résonna dans l'air et le corps se détendit brusquement, inerte. La Garde se releva doucement, et s'adossa à un arbre non loin de là, légèrement titubante, les muscles noués par le combat. Les trois brigands gisaient dans l'herbe fraîche, souillée de sang par endroits. Le leur, essentiellement. Dans les Anderfels, il aurait été impensable de s'en prendre à une personne vêtue de l'uniforme de la Garde des Ombres, mais les choses semblaient bien différentes en Orlaïs. Les conséquences des événements à l'Inébranlable, sans doute. Cela ne présageait rien de bon pour le reste du trajet à venir, bien long pour une personne à pied. Son destrier avait été happé par un groupe de démons deux jours plus tôt. Elle n'avait pas assez d'argent pour s'en procurer un autre, et devait se rendre à Fort-Céleste par ses propres moyens. Ce n'était rien d'insurmontable, mais le voyage ne semblait jamais en finir. La Garde des Ombres poussa un profond soupir et entreprit de nettoyer sa lame dans l'herbe. Elle la rengaina, se saisit de son bâton, et reprit la route, abandonnant les corps sans un regard en arrière.
La pluie tombait drue en ce jour d'automne, rendant sa tâche plus compliquée encore. Chaque pas lui demandait un effort certain pour se stabiliser dans la boue, et elle se sentait à bout de souffle, fait étonnant pour quelqu'un d'aussi rompu qu'elle à l'entraînement physique. Le terrain n'était pas plat, certes, mais la pente était douce. Elle poussa une série de jurons, pestant contre les conditions de son voyage, et continua d'avancer, lentement mais sûrement. Les premiers passages du Cantique de la Lumière lui virent à l'esprit, et elle commença à les réciter, cherchant à y puiser des forces. Hors de question qu'elle s'arrête déjà.

Emmitouflée dans sa couverture humide, Emery fixait le plafond de son abri de fortune. Elle se sentait à bout de force, tant et si bien qu'elle avait du s'arrêter à quelques heures seulement de l'embuscade pour se reposer, boire à la source et se restaurer d'un peu de viande séchée et de pain rassi. Quand elle avait voulu se relever, le sol s'était dérobé, et le monde tournait depuis, décrivant une course étrange à une vitesse folle. Elle avait mis cela sur le compte de la fatigue, et avait installé un campement de fortune dans les ruines de ce vieux moulin, un peu à l'écart du dernier village qu'elle avait traversé. La forêt s'étendait au loin, masse sombre et mystérieuse, étrange et inquiétante. Le ciel tournait en dessous d'elle, et elle le fixait, patiente. La tempête passerait, comme toujours.
Les premiers rayons du jour se posèrent sur ses paupières, et la douce chaleur, promesse d'une journée paisible, la tira des méandres de son sommeil. Elle n'avait pas rêvé, cette nuit, c'était bien. Les yeux mis clos, l'anders tenta d'ajuster sa couverture. Elle avait froid. Son corps était glacé dans la lumière du matin, et ses membres tremblaient comme jamais. Elle attendit un moment que l'air se réchauffe, et se redressa en grimaçant. Le monde bascula à nouveau, et elle dut s'appuyer contre un mur pour vomir. Vomir à s'en étouffer, combattre pour respirer. « A... l'aide... » Elle aurait voulu hurler, mais sa voix était éteinte, mourante. A sa main, plaquée sur sa hanche, perlait du sang. Elle comprit. Du poison, c'était la seule réponse à toutes ces questions. Du poison, un outil de lâches. Elle, la mage Garde des Ombres, force de la nature, allait mourir seule, d'une éraflure empoisonnée. Le Créateur était cruel. Il fallait signaler sa présence, oui, c'était la meilleure chose à faire. Des paysans devaient bien passer par cette route des fois, non ? Possible. La sauveraient elle ? Peu probable. Mais au moins, elle ne finirait pas aux loups.
Le souffle court, la bouche en feu, l'anders se cramponna à sa couverture et la tira de toutes ses dernières forces dans les braises encore vivaces. Un sanglot muet s'empara d'elle, secouant son torse creusé de douleur, et les premières larmes jaillirent, dernier présent à la terre. Elle sentit la chaleur grandit sous ses poignets serrés, et le feu prendre petit à petit, libérant de sombres volutes de fumée âcre. Elle hurla de toutes ses forces de sa voix cassée, un cri de rage et de douleur, vibrant au plus profond de son être. La lumière se brouilla à ses yeux hagards, et l'obscurité l'envahit.

Mer 9 Mai 2018 - 14:44

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9:40 Dragon


Trempé jusqu'à l'os Siha menait un hahl par la bride, piétinant dans la terre boueuse qui collait à ses pieds. Avancer devenait un combat contre la frustration. Bêtes et elfes commençaient à donner signe de fatigue après avoir cheminé toute la nuit afin de ne pas attirer l'attention. Voilà deux jours déjà qu'un déluge se déversait du ciel sans s'arrêter, transformant cette zone reculée des Plaines Exaltées en pernicieux marécages. Parfois l'orage zébrait entres les nuages et éclairait la désolation en dessous de sa lueur éphémère, grondant comme une bête prête à bondir. À travers ce bruit et le mauvais temps il devenait difficile de s'entendre et encore davantage de continuer le voyage. Il y a une demi-journée Siha avait envoyé des éclaireurs à la recherche d'un endroit où faire une halte, un abri naturel ou des habitations abandonnées leur permettant de se restaurer tout en évitant les rencontres avec les humains.

Établir un trajet vers le sud tout en contournant les villages et les patrouilles orlésiennes était une préoccupation constante, car malheureusement leur pacifisme ne contrebalançait pas le poids des préjugés. En cette ère du Dragon pourtant éloignée des Marches et de leurs tragédies, son peuple était encore régulièrement vu comme sauvage par les andrastiens, un tas de vulgaires barbares n'hésitant pas à recourir à la magie du sang et aux sacrifices humains. Ironique quand on savait que seule une infime fraction d'entre eux avait pu croiser un dalatien en personne dans leur vie... seulement hélas la logique ne pouvait rien contre la peur et l'endoctrinement.

- Jilian est-elle revenue ? Le regard planté au loin il était un peu inquiet, comme à chaque fois que des membres du clan quittaient le groupe en territoire hostile.
- Pas encore, non.
- Dans ce cas, faisons une halte.

Dégageant les cheveux qui lui collaient désagréablement au visage l'archiviste désigna un point sur la ligne d'horizon, une colline surplombée par un immense amas rocheux. Les Aravels de tête ajustèrent alors légèrement leur cap, les hahls soufflant de la fumée par les naseaux tandis qu'ils fendaient l'air du matin. Ce n'était pas ce qu'ils espéraient mais avec un peu de chance ils y trouveraient un renfoncement capable de protéger les enfants et les animaux en priorité. Au retour des éclaireurs peut-être auraient-ils un peu plus de chance...
S'en suivit la routine d'installation du campement, une suite de gestes mille fois répétés par ce groupe où chacun avait sa place. D'un œil extérieur on aurait presque cru assister à une danse parfaitement chorégraphiée où tous les participants virevoltaient sans avoir à se consulter. Les tâches des uns étaient continuées par d'autres, parfois raccourcies grâce à un coup de main de celui qui avait terminé le premier. Quoi qu'il en soit des tentes furent plantées et isolées grâce à des peaux en cuir, les Aravels stationnées en sécurité et prêtes à l'entretien. Un feu crépitait à l'abri de la pluie, d'une lueur faible mais tenace.

Siha flatta l'encolure de son vieil ami, le déchargeant de l'attirail de voyage. Tapotant joueusement ses cornes il s'amusa de son regard ronchon. Lui murmurant en dalatien, il le guida jusqu'à l'étable de fortune qui lui était destinée et le laissa paître, libre de toute attache. Les hahls étaient dociles et domestiqués pour qui savait les approcher, néanmoins pour les elfes ces créatures sacrées étaient bien plus que des bêtes de trait. Saisissant un jarre dans leurs provisions Siha versa de l'eau dans la mangeoire et pendant plusieurs minutes il observa les animaux avec la satisfaction du travail accompli.
Cependant un sentiment d'inquiétude remontait à la surface au fur et à mesure que le temps s'écoulait. Il n'était pas normal que les éclaireurs s'absentent aussi longtemps, à moins d'avoir trouvé quelque chose d'inhabituel sur leur chemin. D'un autre côté ils avaient pour ordre de rentrer ou demander des renforts au moindre signe de danger, ce qui ne présageait rien de bon. Soupirant à s'en fendre l'âme, il finit par vite tourner en rond une fois les bêtes nourries et s'assit sous une tenture. Commençant à sérieusement envisager l'idée de patrouiller les cieux sous forme d'oiseau, Siha sursauta quand une voix familière l'aborda tout à coup.

- Ir abelas. Nous n'avons pas trouvé de meilleur emplacement pour le campement, mais Sehariel est...
- Que s'est-il passé ? Il bondit sur ses pieds, paniqué.
- Sehariel va bien, mais il a trouvé... La rouquine se tut brusquement, hésitante et confuse. Une shem inconsciente sur la route.
- Pardon ?
- Elle porte l'uniforme des Gardes des Ombres et elle est blessée. Nous n'étions pas d'accord sur la marche à suivre, alors je suis rentrée vous prévenir.
- Tu as bien fait.

Ses sourcils se froncèrent tandis qu'il imaginait aisément le dilemme de son frère et le conflit qui avait dû en découler avec Jillian, ancienne citadine. Leurs éducations étant totalement différentes, il était prévisible que leurs points de vue soient diamétralement opposés. Si tous deux auraient naturellement été d'accord sur l'idée de porter secours à membre de la Garde, le fait qu'il s'agisse d'une humaine changeait complètement la donne. Néanmoins pour Siha il n'y avait pas le temps de se poser trop de questions. Le clan avait jadis été sauvé grâce à l'intervention d'un Garde... aujourd'hui les dieux avaient sans doute décidé que l'heure de rendre la pareille était venue. Saisissant sa sacoche de soins, l'archiviste s'équipa de son bâton et suivit l'éclaireuse au pas de course.

***

Le transport avait été un sacré chantier mais c'était enfin fini, ils étaient arrivés à bon port. Ne sachant pas ce qui avait causé la perte de conscience de l'inconnue, Siha avait insisté pour qu'ils utilisent un brancard tiré par un hahl afin de la secouer le moins possible. Sur place il lui avait fait boire un remontant afin de lui faire reprendre des forces, leur offrant le temps de la déplacer là où il pourrait la soigner. Rester à découvert sur une route n'était malheureusement pas une option, aussi il leur avait fallu prendre le risque.
Toutefois maintenant qu'il avait pu l'examiner en toute tranquillité, dissimulé aux regards curieux par l'étoffe de sa tente, Siha semblait enfin retrouver un peu de son calme. L'état de l'inconnue s'était passablement amélioré depuis qu'il lui avait fait boire une infusion d'herbes, un vieil antidote transmis entre archivistes. Ce n'était pas suffisant pour guérir le mal qui la rongeait, mais au moins cela lui donnerait les armes de le combattre. Et avec cela peut-être aurait-il l'occasion de lui parler pour en apprendre plus sur ce qui s'était passé, et adapter le traitement si nécessaire.

Repoussant sa natte dans son dos il imbiba du tissu dans de l'eau froide et la passa dans le cou et sur le front de la jeune femme. Fasciné par sa beau sombre, il effleura gentiment son visage et laissa la magie affluer à travers ses doigts afin de refermer les blessures externes. Maintenant qu'elle était délestée de son armure, la fièvre finirait sûrement par retomber. Sa voix se fit soupir.

- Décidément, mon chemin semble être secrètement lié à celui de la garde...



Jeu 17 Mai 2018 - 15:51

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Le monde s'était tut, et le vide béant qui gravitait autour d'elle l'avait enveloppé de son voile noir. Le bourdonnement sourd et le crépitement du feu avaient fait place au silence profond, inquiétant, de semi-conscience. Par moments, des bruits inconnus s'étaient imposés à elle, et des paroles chantantes, dans une langue qu'elle ne connaissait pas mais dont elle pouvait comprendre l'intention. Était-ce ça, la mort ? Était-ce cet état de lévitation, hors de son corps mais pourtant toujours connecté au réel ? Elle aurait du.. passer par l'Immatériel, non ? N'était-ce pas la logique ? Elle sentit un liquide froid lui couler le long du cou. Frisson. Elle ouvrit les yeux. Elle aurait voulu se redresser brusquement, poser ses mains sur son visage, caresser un objet, parler, rire, hurler, pleurer, chercher une preuve qu'elle était en vie, mais son corps ne répondait plus. Elle ne pouvait plus bouger le moindre membre, autre que de faibles clignements des yeux.
La lumière vint à elle en premier, et elle mit quelques instants à discerner les contours flous des formes de l'endroit dans laquelle elle se trouvait. A en juger par les rayons colorés qui éclairaient le sol devant elle, elle était dans une sorte de tente, avec un sol en bois clair. C'était beau. Inattendu aussi. Une personne se tenait devant elle. La silhouette était élancée, les traits du visage étaient fins, encadrés par de longs cheveux bruns. Au premier regard, elle n'aurait su dire s'il s'agissait d'un homme ou d'une femme, mais cette personne était gracieuse, d'une grande beauté aussi. Elfe. Elle était donc dans ce qui devait-être un aravel dalatien, ces nomades qui allaient de terre en terre à la recherche de leur héritage perdu. Un peuple fier. Un privilège rare aussi, d'y être admise en tant qu'humaine.
Elle parvint à ouvrir la bouche pour se manifester, tenter de comprendre ce qu'il se passait. Le son qui en émana était faible, un gémissement tout d'abord, à peine plus fort qu'un murmure, puis un souffle articulé, tout juste audible. « Vous... m'avez sauvée ? » L'elfe reporta son attention sur elle. Elle vit ses yeux jaunes, deux beaux yeux aux teinte du miel, et respira profondément, soudainement apaisée. Sa main parvint à glisser sur la hanche, fébrile, et elle constata que la plaie s'était refermée. De la magie probablement, les Archivistes elfes pratiquaient dans l'ancienne magie elfique, et ils devaient être en mesure de faire des miracles. Ses mains étaient bandées, mais elle ne sentait plus de douleur y affluer. De la magie donc. D'où son regain rapide d'énergie. Mais le diagnostic avait été incomplet, et elle allait mourir si ses hôtes n'en prenaient pas conscience. Elle continua d'articuler avec lenteur et précision « J'ai été empoisonnée. C'est lent, engourdissant. Perte d'équilibre. Nausées. » Elle n'en savait pas plus. Mais les elfes dalatiens étaient réputés pour leur connaissance de la nature et des antidotes aux poisons. Elle avait bon espoir que cela suffise. Elle se sentait épuisée. Ses yeux se fermèrent un instant, et elle sombra dans le sommeil.

Le soleil commençait à décliner quand elle revint à nouveau à elle. Rien ne semblait avoir bougé dans la pièce, et l'elfe était toujours là, mais elle commençait à se sentir un peu mieux. Ses membres bougeaient avec plus d'aisance. Elle se redressa doucement de sa couchette pour s'adosser à ce qui ressemblait à un mur en bois, et poussa un profond soupir de soulagement. « Merci. » Ses mots planèrent dans l'air un instant tandis que des larmes lui montaient aux yeux, elle qui n'était pas habituée à se faire submerger par ses émotions. « Vous m'avez sauvé la vie, et je ne sais si je pourrai un jour m’acquitter de cette dette envers vous et votre peuple. » Ses yeux se posèrent sur son uniforme, posé au pied du lit de camp, et elle réalisa qu'elle portait désormais une tunique légère, très douce. « Je suis Emery Rana, Garde des Ombres des Anderfels. Je cherchais à rejoindre Fort-Céleste quand j'ai été attaquée par des bandits, qui ont du enduire leurs lames de poison, j'imagine. Heureusement que vous m'avez trouvé. » Nouveau silence. « Excusez moi, mais où suis-je ? »

Jeu 17 Mai 2018 - 20:58

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« Reposez-vous. »

Avait-il dit gentiment, posant une main ferme sur son épaule pour la dissuader de se redresser. Il doutait que la garde en ait la force dans son état, mais il valait mieux en être sûr. D'autre part les symptômes qu'elle lui avait décrits aidaient à écarter diverses possibilités. Les effets étaient trop lents pour que ce soit létal dans un premier temps, aussi ses attaquants utilisaient sûrement un poison visant à leur procurer un avantage au combat, peut-être pour paralyser ? S'approchant pour observer ses pupilles, Siha effleura le visage toujours bouillant de l'humaine. Son expression était calme mais sous son front les idées fusaient à toute vitesse.

« Cela ressemble à du venin de serpent, mais ce n'est pas tout à fait la même chose... C'est un peu comme... ce poison des esclavagistes tévintides. Il se parlait à lui même, marmonnant les sourcils froncés. Oui,... c'est proche du somnius qu'ils utilisent pour capturer les elfes. »

Fouillant furieusement dans sa sacoche il retira un mortier, des fioles et des herbes soigneusement enveloppées dans du cuir ; puis il glissa un bras hors de sa tente afin d'appeler quelqu'un sans faire trop de bruit. Jillian ne tarda pas à passer sa tête par l'encadrement du tissu, guettant avec son zèle habituel.

« Amène-moi de la poudre de viveracine, de l'épine de dragon séchée et de la versimite. Commençant à préparer un onguent, il écrasait une poignée d'herbes en même temps qu'il donnait des consignes. Que quelqu'un prépare un repas également, il est important qu'elle mange dès que possible. »
« Tout de suite, hahren. »
« Oh et Jillian... Siha ouvrit la bouche pour lui dire de ne pas l'appeler ainsi pour la millième fois mais au vu de l'urgence il finit par laisser tomber. Si tu ne reconnais pas les herbes, demande de l'aide à Sehariel. »

La rouquine acquiesça d'un air grave et s'en fut presque en courant, déterminée à faire ce qu'on lui avait demandé dans les plus brefs délais.

***

Le calme revint progressivement sur le campement improvisé, où la fraîcheur du matin se transforma en froid mordant durant la journée. Le soleil se couchait déjà lorsque la fièvre d'Emery retomba enfin. Siha posa une autre couverture sur ses épaules, content qu'il ne se soit pas remis à pleuvoir depuis leur arrivée. Au moins ne baignaient-ils pas dans l'humidité du sol, ce qui aurait rendu repos et travail passablement plus compliqués. D'un autre côté les effets du poison semblaient se dissiper petit à petit depuis qu'il avait appliqué l'onguent sur sa poitrine, ce qui était encourageant pour la condition de leur invitée surprise. Depuis il était resté à son chevet, terriblement las du voyage nocturne mais soulagé par la rapide convalescence. À vrai dire cela faisait une petite dizaine de minutes qu'il était en train de pathétiquement piquer du nez quand la voix chargée d'émotion de la jeune femme le tira de sa torpeur. Pris à défaut, il mit un certain temps à enregistrer ce qu'elle venait de dire.

« Notre clan avait une dette à solder envers un ami nain membre de la Garde, aussi il est naturel que nous ayons tenté de vous porter secours. Je suis simplement heureux de voir que vous allez mieux. Il vous faudra quelques jours de repos... mais le pire devrait être passé, maintenant. »

Se grattant la nuque, il sourit aux multiples questions, pas sûr que son cerveau engourdi arrive à suivre le rythme. Cela faisait plus d'une nuit et d'un jour qu'il était debout, avec des heures de marche dans les jambes. Confus, il mit donc plusieurs secondes à réaliser ce qu'on lui demandait.

« Vous êtes dans un lit... Mon lit. Penchant la tête sur le côté, il ne se rendit pas compte du ridicule de ce qu'il venait de dire. Puis en voyant l'expression d'Emery il toussota avec gêne et se reprit. Oh... hm. Nous avons dû nous arrêter à cause du mauvais temps et faire une halte avant d'entrer dans la forêt de Tirashan, ce qui est à à environ une heure de la route où l'on vous a trouvée. »

Prenant une grande inspiration il s'étira les bras et se craqua insoucieusement la nuque. Puis il lui tendit un bol de soupe encore tiède, qui lui était initialement destiné. Il pourrait toujours en demander un autre, de toute façon. L'encourageant à reprendre des forces, Siha l'observait avec curiosité. Il avait souvent été amené à visiter les cités humaines au cours de ses pérégrinations un peu spéciales, mais jusque là il n'avait jamais vraiment pu croiser un humain d'aussi près...

« Oh et je suis désolé, j'ai... dû retirer votre armure et vos vêtements trempés. D'un geste un peu embarrassé il espéra qu'elle ne le prenne pas mal, après tout appliquer un antidote à même la peau était bien plus efficace que de le faire ingérer. Vos affaires sont toutes là normalement, nous en avons pris soin lorsque nous vous avons transportée. Vous voyagez léger... et seule. Loin de moi l'idée de douter de vos capacités mais... c'est vraiment trop dangereux dans ce coin de Thedas, même pour une mage. »

Mar 22 Mai 2018 - 15:35

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L'elfe semblait exténué, et il mit quelques secondes à montrer des signes de compréhension de ce qu'elle venait de dire, secondes qui furent particulièrement longues, car la mage se retrouva plongée dans un doute profond : et si elle avait rêvé, et qu'il ne comprenait pas la langue commune ?  Et si elle délirait depuis tout à l'heure ? Et si les choses qu'elle voyait n'étaient pas celle qu'elle croyait ? D'un ton chantant – la grâce des elfes dalatiens, semblait-il – celui qui semblait être l'Archiviste du clan, leur guide, lui répondit que son clan lui était venu en aide en souvenir d'un événement où un Garde des Ombres les avait aidé. Il enchaîna aussitôt en lui expliquant qu'elle était tirée d'affaire et qu'elle serait à nouveau sur pied après quelques jours de repos. L'Anders acquiesça lentement, assimilant peu à peu les informations qu'il venait de lui donner. Sa curiosité était vive, car il n'était pas de coutume dans la Garde d'envoyer des nains au sein des clans dalatiens : on privilégiait les dalatiens, toujours, et les elfes citadins dans une moindre mesure. Elle était certaine qu'une histoire passionnante était là dessous, mais elle garda cela en tête pour plus tard. Quant à son temps de convalescence, elle n'était pas surprise. La blessure n'était pas lourde, elle aurait pu repartir le lendemain si elle n'avait pas propagé du poison en elle. Elle s'en remettait donc à la sagesse de cet homme.
« Vous êtes dans un lit... Mon lit. » Emery écarquilla brièvement les yeux face à cette formulation, étrange. Elle se ravisa aussitôt, mais son étonnement avait été visible, car elle vit son interlocuteur perdre sa contenance quelques secondes. Lui aussi se reprit aussitôt, visiblement embarrassé : « Oh... hm. Nous avons dû nous arrêter à cause du mauvais temps et faire une halte avant d'entrer dans la forêt de Tirashan, ce qui est à à environ une heure de la route où l'on vous a trouvée. » Elle acquiesça de nouveau en silence et baissa les yeux sur le lit, feignant de se plonger dans de passionnantes pensées et évitant par là même le regard désarmant de l'elfe androgyne. Il se retourna dans un coin de la pièce et revint avec un bol de soupe tiède, qu'il lui tendit. Emery s'en saisit, les mains tremblantes, et commença à le sentir. Elle n'avait pas peur d'un nouveau poison non, mais souhaitait savoir s'il s'agissait d'un repas ou d'une mixture médicinale destinée à la rendre mieux. D'après les encouragements de l'elfe, il s'agissait bien d'un repas. « Merci. » Des mots simples valaient parfois mieux que de grands discours. Elle n'avait pas faim, mais cela faisait partie du processus de rétablissement : aucune personne ne se relevait d'une maladie ou affliction du genre sans se nourrir. Elle mangea avec lenteur, méticuleuse. Ses mains tremblaient, et il était hors de question d'en mettre partout. Elle était dans son lit, après tout.
« Oh et je suis désolé, j'ai... dû retirer votre armure et vos vêtements trempés. Vos affaires sont toutes là normalement, nous en avons pris soin lorsque nous vous avons transportée. Vous voyagez léger... et seule. Loin de moi l'idée de douter de vos capacités mais... c'est vraiment trop dangereux dans ce coin de Thedas, même pour une mage. » La mage en question releva la tête et déglutit bruyamment. Elle toisa l'elfe, toujours debout à côté d'elle, si grand, si fin. Ses joues semblaient s'être un peu colorées, comme s'il était mal à l'aise. Cela l'embêtait de le mettre en pareille situation chez lui. Elle posa le bol quasi-vide dans un coin stable du lit, et prit enfin la parole. « Je vous en prie, vous êtes chez vous... Asseyez vous s'il vous plaît. Vous semblez exténué. » Elle désigna le lit devant elle. Elle était assise après tout, et il y avait bien de la place pour deux. « Mais s'il vous plaît, ne le prenez pas mal, loin de moi l'idée de vous imposer quelque chose chez vous. Je suis l'étrangère ici, j'en ai bien conscience. » Elle savait que de nombreux elfes dalatiens étaient plus que méfiants envers les humains, et les haïssaient même. C'était logique, quand on pensait à ce qu'il était advenu à ce peuple par leur faute. Aussi, même si cet Archiviste semblait avoir décidé de lui venir tout de même en aide, il se pouvait que cela ne soit pas un point de vue partagé au sein de son clan, ou simplement qu'il prenne offense de certains actes qui pourraient la faire passer comme arrogante et supérieure.
Elle commença par répondre à la dernière question, qui n'en était pas vraiment une, mais qui demandait de plus amples explications. « Je ne voyage pas par ici par plaisir, en réalité... Euh... Je ne sais même pas comment je suis sensée m'adresser à vous ? Monsieur ne convient pas à un elfe, je crois, et vous semblez important. Je... Je m'appelle Emery, mais si vous m'appelez Garde, je comprendrai très bien. Les prénoms Anders sont parfois difficiles. » Elle tenta de se redresser au mieux et inspira à nouveau. « Je viens de Weisshaupt, notre forteresse ancestrale des Anderfels, cette nation désolée tout au Nord-Ouest de Thedas. On m'a demandé de rejoindre l'Inquisition, dans les Dorsales de Givre, pour... Eh bien pour aider à la reconstruction de la Garde d'Orlaïs, et former une nouvelle génération de mages. Leurs derniers sont tous morts, corrompus par Corypheus. » Elle parlait de choses dont elle ne savait même pas s'ils faisaient sens à son interlocuteur, qui pouvait très bien être coupé des nouvelles d'événements récents en Orlaïs. Les elfes dalatiens vivaient à l'écart, après tout. D'un autre côté, elle ne pouvait pas répondre à cette interrogation sans l'évoquer, car ce serait l'éluder ou mentir, et elle se devait d'être franche. « J'ai perdu mon cheval il y a quelques jours, et je n'ai pas les fonds qui me permettent d'en racheter un. Je continuais donc à pied depuis, et je suis tombé sur des bandits. » Cela résumait grossièrement son épopée.
Elle étendit son bras droit pour s'étirer, et cela lui fit du bien. « Vous avez dit que j'en aurais pour plusieurs jours avant d'être à nouveau sur pied. Pour autant, je ne pense pas qu'il soit dans votre intérêt de camper ici, et je ne veux pas être un fardeau pour vous. Et la présence d'une shemlen, mage de surcroît, peut créer des tensions inutiles dans votre clan, j'imagine. Si vous le souhaitez, je tenterai de rejoindre une auberge demain, dès que j'aurais dormi. » Elle hésita un instant. Elle s'engageait sur un terrain qui était beaucoup moins confortable pour elle, beaucoup plus glissant. Rassurer d'abord avant de poser la question gênante, oui. Bonne idée. « Vous avez bien fait de retirer mon armure et mes vêtements, j'imagine que c'était nécessaire pour pouvoir me soigner, et je vous en serai éternellement reconnaissante. J'espère seulement que cela n'a pas été une gêne pour vous. » Ah si, la gêne arrivait déjà. Mince. Elle sentait le feu lui monter aux joues, et elle baissa les yeux vers son bol de soupe. Une nouvelle longue inspiration lui donna le courage dont elle manquait tant. « Si je suis présentement dans votre lit... Où allez-vous dormir ? »

Lun 28 Mai 2018 - 19:19

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Avec une curiosité un peu déplacée Siha observait la jeunes femme manger d'un air concentré. Il sentait la tension dans son expression fatiguée et même son corps semblait emprunt d'une incroyable nervosité, comme si elle avait peur de ses réactions. Pendant un instant il s'interrogea sur sa source, et se demanda si les préjugés sur les dalatiens n'avaient pas encore fait des ravages. Intrigué il finit par s'asseoir en tailleur à même le sol, sur les tapis tissés en tons de vert et sable. Un immense aigle aux ailes déployées marquait le centre de la pièce sans murs, un des très rares luxes de la tente de l'archiviste.
Et à bien l'y regarder, lui, on ne voyait pas là trace de son rang. Ses cheveux rassemblés dans une natte confuse étaient encore humides de pluie, son visage hagard était las mais calme, ce qui lui donnait un air d'être spirituel particulièrement fatigué. Même ses modestes habits de lin bleu ne marquaient pas de frontière nette entre les genres. Une grande taille pour un elfe, des mains caleuses avec de longs doigts, des sourcils fins mais anguleux ; des lèvres rosées, un regard doux, des cheveux longs, un corps athlétique mais pas musclé.

« Non je vous en prie, ne dites pas ça. Il dodelina de la tête en levant une main pour l'interrompre avec un sourire. La vertu d'hospitalité est très importante pour le clan Bellanaris, aussi vous êtes notre invitée pendant la durée de votre convalescence. »

De fait il ne pourrait pas l'empêcher de privilégier sa fierté si c'était ce qu'elle désirait, mais il lui paraissait bien déraisonnable de s'acharner dans son état de santé actuel. Son organisme était encore affaibli, en dépit des signes encourageants.
Rangeant un peu son matériel d'herboristerie, le mage fit de la place en tassant les bouquins en une pile et rangea méticuleusement ses fioles, sans se départir de sa bonne humeur. Bien que les circonstances de son arrivée soient tout à fait regrettables, il trouvait cela fort rafraîchissant d'avoir un peu de visite... Pour peu qu'ils parviennent à mettre les différences culturelles de côté. Néanmoins jusque là Emery n'avait fait preuve que d'une profonde politesse, couplée à la peur de mal faire. C'était déjà rassurant qu'il n'y ait ni dégoût ni colère dans ses gestes.

« Faites comme tout le monde et appelez-moi Siha. Ses épaules roulèrent avec légèreté. Je suis l'archiviste et seul mage du clan aussi je sers de guérisseur, mais les formalités ne sont pas nécessaires. »

L'elfe n'avait pas les manières d'un bourgeois mais son élocution était soignée et impeccable. Probablement soit avait-il été instruit dans le langage universel, soit avait-il souvent eu l'occasion de le pratiquer. En tout cas son visage ne trahissait ni gêne ni doute quand à la présence d'une humaine dans son espace privé. Avec patience il avait écouté ces informations, s'abreuvant de ces curieux éléments. À force de voyager et tendre l'oreille il avait appris des rumeurs et autres bruits courant partout à Thedas, mais bien des choses lui échappaient encore. Malheureusement les failles dans le ciel, la cause Felassan et l'avenir de son clan accaparaient tout son temps, aussi il était de plus en plus compliqué de prêter totalement attention aux rixes politiques des uns et des autres. Néanmoins au milieu de la pluie de références, un nom lui fit froncer les sourcils au vu de la gravité des accusations. Cela allait bien trop vite.

« Coryphe... ssus, qui est-ce ? »

S'arrêtant subitement avec un livre à la main, il en fit tomber toute une pile par mégarde. Cela dit il retint la vague de questions pressantes qui lui mordaient la langue et laissa Emery répondre à son rythme. S'écartant pour aller chercher une bouilloire d'eau chaude au feu de camp, il prit deux verres et prépara le thé tout en continuant de discuter.

« Nous avons établi le campement afin de dormir et manger, alors ne vous en faites pas. Vous pourriez rester, en fait ce serait plus sûr pour tout le monde. Nous comptons faire un détour par la forêt afin de ne pas attirer les regards et voyager en sécurité. Heureusement les brigands n'osent pas s'aventurer à Tirashan, de peur d'être mangés par des sauvages. Il haussa à nouveau les épaules avec sarcasme. Il faut bien que quelques légendes grotesques qui circulent servent à quelque chose, j'imagine. »

S'asseyant à nouveau, il s'adossa à un grand coffre de bois travaillé.

« J'imagine que cela fait un détour un peu long pour vous qui pouvez traverser Orlais en plein jour, mais vous êtes libre de faire un bout de chemin avec nous, si vous voulez. De fait j'aimerais que vous restiez, au moins le temps de vous remettre et être sûre que le poison a été totalement éliminé de votre sang. »

Il la regarda dans les yeux pour appuyer sa demande, espérant avoir un peu de poids de cette façon. Puis enfin il sourit d'un air entendu, visiblement passé maître dans l'art de persuader à force de douceur.
Soulevant le couvercle pour épier la boisson, il inspira l'odeur plaisante de plantes et d'orange qui s'installait dans la tente. Se jugeant satisfait il versa deux verres avant d'en tendre un en direction de la jeune femme.

« Si vous n'aimez pas ça ne vous sentez pas forcée, surtout. » Soufflant sur sa boisson il la tint dans les mains davantage pour se réchauffer que pour boire. Sa langue était bien trop sensible pour ça, hélas. Siha était un vrai chat en la matière. Par ailleurs il était sûrement trop fatigué ou obtus pour suivre, ce qui le faisait répondre innocemment... quitte à prolonger les mal entendus.

« Dans mon... Oh. Hm. J'installerai une autre paillasse ici, à moins que vous ne vouliez pas passer la nuit avec moi ? » Il se mordilla la lèvre, réfléchissant à la disposition de la quinzaine d'autres tentes. Toutes n'étaient pas complètes, néanmoins tous les résidents ne seraient pas forcément enchantés à l'idée de partager leur espace avec une humaine.

« Celle-ci est de loin la plus spacieuse, et je me sentirais mieux en sachant que je suis là au cas où vous avez besoin de moi. Pardon... ce n'est pas correct d'imposer une telle chose à une dame. » Se penchant en avant, il s'inclina comme il avait vu les elfes des cités le faire si souvent.

Dim 3 Juin 2018 - 12:14

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Siha. Un nom court, qui résonnait bien. Facile à retenir, surtout pour un prénom elfe. Cela lui allait. Cela ne l'orientait pas plus sur le genre de l'Archiviste, mais cette chose était assez secondaire après tout. Il la rassura au mieux, lui expliquant que sa présence était bienvenue au sein du clan le temps de se remettre de cet accident. Cela calma un peu la boule au ventre qu'elle ressentait, et les questions incessantes sur le fait qu'elle soit bienvenue ici, malgré son uniforme de Garde (enlevé d'ailleurs), en tant que shemlen. Siha lui tendit un verre d'une boisson à la forte odeur, dont les subtilités lui échappaient, à part le parfum d'orange. L'anders esquissa un sourire. Elle avait le sentiment d'être à Hosseberg, lors d'un de ces rares moments privilégiés où elle pouvait déguster de ces agrumes de pays plus verdoyants que ses terres arides natales. « Merci... Siha. » Il y avait toujours le reste de soupe, aussi décida-t-elle de le poser au sol, le temps de finir son bol, au moins par politesse. C'était bon, mais elle manquait d'appétit. Elle profita du léger silence pour se forcer à engloutir le fond en quelques grandes cuillères, de manière assez peu élégante.
« Dans mon... Oh. Hm. J'installerai une autre paillasse ici, à moins que vous ne vouliez pas passer la nuit avec moi ? » Emery, qui venait de triompher de sa dernière cuillère toussa, et failli être contrainte de recracher pour retrouver de l'air. Elle déglutit péniblement, les joues brûlantes. Elle n'eut pas le temps de retrouver ses esprits pour en dire d'avantage que déjà, Siha enchaînait : « Celle-ci est de loin la plus spacieuse, et je me sentirais mieux en sachant que je suis là au cas où vous avez besoin de moi. Pardon... ce n'est pas correct d'imposer une telle chose à une dame. » Il conclut par une sorte de pirouette qu'elle ne connaissait pas, mais qui devait être une forme de révérence, assez atypique de l'image répandue des elfes dalatiens. Cela eut le don de la mettre encore un peu plus mal à l'aise. Afin de tenter de dissimuler son état soudain, et la chaleur qui affluait dans tout son corps, la Garde des Ombres se saisit de son verre pour en boire quelques gorgées. La boisson était plaisante, très parfumée, et elle lui adoucit la gorge et commença à la calmer instantanément.
« S'il vous plaît Siha, je peux être ce que vous voulez, mais surtout pas une Dame. Je ne suis pas une noble, et il n'y a aucune déférence à avoir avec moi. Je ne suis que Garde des Ombres, et mon statut me place sur un pied d'égalité avec tous les gens du commun, quelle que soit leur espèce. Et... cela me met mal à l'aise de voir un Archiviste comme vous, gardien de son peuple, me rendre de tels hommages. Je devrais plutôt tâcher de vous honorer avec des coutumes dalatiennes, mais je n'en connais guère, malheureusement. » Cela l’embarrassait vraiment d'être si inculte dans le domaine, et d'accentuer de fait, involontairement, l'image de son peuple auprès des elfes. Mais elle ne doutait pas que son passage accidentel au sein du clan lui permettrait d'en apprendre plus. Elle finit son verre d'une traite, et le posa à côté de son bol de soupe, vide lui aussi. « Je... ne souhaite pas vous contraindre à dormir par terre, Archiviste. Cela me donnerait le sentiment d'être supérieure, bien que blessée, et cela me chagrinerait. Je peux y aller, si vous le souhaitez... Ou alors, je pense qu'il y a assez de place dans ce lit pour nous deux, nous ne sommes après tout pas du genre corpulents. Euh... en tout bien tout honneur bien sûr, jamais je ne me permettrais... quoi que ce soit... de déplacé... euh... Si cela ne vous gêne pas. »
Emery était en proie à des émotions contradictoires. D'une part, la fatigue et la lassitude, doublés de la peur de mal faire, d'agir de manière déplacée et la gêne qui en découlait. De l'embarra aussi. D'autre part, de la curiosité, et une forte envie de jouer et de découvrir les limites de son bienfaiteur, de voir où il pouvait aller dans un élan presque pervers. Ces deux courants s'alimentaient l'un autre, et elle se retrouvait perdue au milieu de cette tempête, à tenir des propos étranges à l'Archiviste. Devait elle accompagner le geste à la parole ? Peut-être, mais laquelle ? La prude ou la sauvage qui régnait en elle ? Finalement, sans trop savoir pourquoi, elle commença à se défaire de sa veste. Des mots, étranges eux aussi, comme prononcés par une personne au loin, mais dont les echos faisaient sens dans sa tête aussi. « Dans tous les cas, Siha, pardonnez mon impudeur... J'ai peur d'avoir trop chaud. »

Mar 5 Juin 2018 - 17:57

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Avec appréhension il s'était penché vers la Emery toussante qui avait manqué de recracher sa soupe et sûrement une partie de ses bronches. Posant une main sur ses épaules pour la soutenir il n'osa approcher d'avantage, mais ses sourcils noirs se plissèrent en une ligne presque unie d'inquiétude. Néanmoins si la condition de son invitée semblait ne pas s'être détériorée, sa demande le prit un peu au dépourvu. Il avait voulu bien faire en lui manifestant des marques de respect typiquement humaines, mais sans doute s'y était-il mal pris. Ça ou ses gestes avaient eu l'effet contraire à celui désiré, à cause des divergences politiques et nationales peut-être.
C'est vrai qu'elle s'était présentée comme Anders, alors copier les manières Orlésiennes n'était pas la plus lumineuse des idées, bien qu'elles soient les seules traditions humaines qu'il connaisse. Dodelinant de la tête face à sa propre stupidité, il expira lentement tout l'air de ses poumons et se força à retrouver un sourire maladroit.

« Les Archivistes n'ont un statut particulier qu'aux yeux de leurs frères et sœurs dalatiens. Au fond nous sommes des elfes comme tant d'autres, et je dois avouer que malgré ce qu'on peut vivre en dehors de nos territoires, parfois ce n'est pas plus mal. Il ré-arrangea les livres comme il put, manquant un almanach aux pieds d'Emery. Sur une des pages se dressait le croquis d'un majestueux hahl, tandis que sur l'autre deux enfants shemlen jouaient en souriant. De plus... appelez cela de la naiveté si vous voulez mais un Garde aura toujours un statut honorable à mes yeux, jusqu'à preuve du contraire. À ce titre vous serez toujours spéciale. »

Il avait pu échanger suffisamment avec Karlan pour en apprendre un peu sur la Garde. Ce n'était pas par ignorance qu'il pensait de cette façon, après tout il savait qu'ils recrutaient des candidats indifféremment de leurs origines, mais aussi de leurs vies passées. À bien y réfléchir bien sûr que c'était dangereux d'offrir une seconde chance à des déserteurs et autres criminels... mais Siha ne pouvait être indifférent aux vertus de sacrifice, tolérance et absolution.

« Maintenant si ce qui vous gêne c'est d'être réduite à votre fonction de garde, je peux faire un effort pour le laisser de côté si c'est ce que vous souhaitez. Il la regardait dans les yeux, intrigué. Comme à son habitude une certaine gourmandise prenait le dessus... il en voulait toujours plus. D'ailleurs bien que je ne puisse vous demander de laisser tomber le protocole en public afin de nous éviter des ennuis à tous les deux, j'aimerais que vous oubliez mon poste d'archiviste lorsque nous sommes tous les deux. Peut-être arriverons nous à mieux interagir d'égal à égal ainsi. »

Entamant enfin son thé, Siha se retenait depuis plusieurs minutes déjà de toucher le front d'Emery pour vérifier sa température. Son expression confuse et ses joues avaient certes au moins repris quelques couleurs, mais il s'inquiétait tout de même de la voir fiévreuse et épuisée. Soucieux de trouver une solution à leur drôle de problématique, le mage resta là une paire de minutes, pesant le pour et le contre de la situation. Sous son front tranquille les idées fusaient.

Sa tente était légèrement à l'écart et il pouvait aisément demander à ce qu'on les laisse se reposer sans être dérangés. Il pourrait prendre soin d'elle la nuit, à supposer que le sommeil ne le fasse pas tomber comme une souche. Il lui paraissait totalement inacceptable de laisser la demoiselle, affaiblie qui plus est, dormir par terre. Non seulement ce serait manquer à tous ses devoirs d'hôte, mais en plus que penserait-elle des Bellanaris ? Ils n'étaient pas des sauvages incapables d'hospitalité...
D'un autre côté il n'était pas impossible que cette femme malgré son faciès engageant et son humilité, soit une brigande ayant subtilisé une armure de la Garde. Il serait alors fort téméraire de la laisser sous son toit et dans son lit, comme s'ils se connaissaient depuis toujours. Siha soupira en imaginant très bien la crise de nerfs que ferait Sehariel s'il avait la moindre idée de ce qui se passait en ce moment. Heureusement il était sûrement à la chasse, ce qui reporterait l'inévitable.
Après quelques minutes Siha finit par reposer son verre à demi vide et acquiescer silencieusement, comme pour se donner le courage de faire confiance. Il dormait avec son frère presque tous les soirs, alors pourquoi cela se passerait-il mal avec une inconnue ? Retenant l'ironie de ses propres réflexions, il haussa les épaules et tenta de dédramatiser.

« Bon d'accord, si vous êtes sûre de ce que vous voulez. La nuit sera froide aussi j'imagine qu'un peu de chaleur corporelle nous fera du bien à tous les deux. Enfin j'espère vraiment que mes rêves seront moins agités aujourd'hui. Son regard ambré se fit plus grave, presque angoissé. Autrement je risque de vous faire fuir en courant, persuadée que je suis possédé. Oh et avant que vous vous posiez des questions, ce n'était qu'une blague. Les dalatiens prennent ces choses très au sérieux et ont développé des protections magiques, aussi vous pouvez dormir sur vos deux oreilles. »

Lun 11 Juin 2018 - 10:54

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Le fin tissu de sa veste descendait peu à peu le long de son corps, dénudant ses épaules pour commencer. La Garde des Ombres allait très lentement, le regard fixé sur un Siha visiblement en proie au doute. Elle ne voulait pas créer d'accident, non. Elle avait eu le sentiment que... qu'elle en avait envie. Peut-être que lui aussi, dans ce cas ? Mais cela ne semblait pas d'être tout à fait le cas. La fatigue et la confusion les plongeaient tous les deux dans des étranges méandres, comme si la réalité s'étirait autour d'eux, que les soucis se faisaient plus secondaires, plus lointains aussi. Le monde flottait, et Emery se laissait porter, s'y baignait, lâchant prise, ses mains accompagnant le mouvement, comme une danse, une promesse. La première manche lui tomba au niveau du coude, laissant apparaître une nouvelle courbe ébène, délicate. La voix de l'elfe résonna à ses oreilles comme un murmure lointain. Des mots étranges, dont elle ne saisissait pas bien le sens. L'émotion oui, la volonté aussi. Dormir, juste dormir, en sécurité, l'un contre l'autre. D'accord. Elle était fatiguée de toutes manière, ses membres étaient lourds, comme engourdis. L'Anders acquiesça en silence et acheva de retirer sa veste, si lourde, si chaude. Elle sentait un maigre souffle de vent frais lui caresser la peau, et elle ferma les yeux un instant, savourant ce plaisir fugace. Ses lèvres se remuèrent, et des sons étranges en émanèrent, étrangers.
« Bien, dans ce cas allons dormir Siha, en sécurité. » Ses yeux se rouvrirent, et elle esquissa un léger sourire. Puis, elle allongea les jambes et se laissa glisser sur le lit, le dos contre la paroi de tissu, et le corps tourné vers l'elfe. Sa tête se posa doucement sur son bras tendu lascivement devant elle, comme un prolongement de son corps. « N'ayez pas peur, je n'ai pas non plus pour habitude de mettre en danger les personnes qui dorment avec moi. » Un murmure, promesse discrète. « Tout va bien se passer. »

Lun 11 Juin 2018 - 12:20

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Ses mains s'étaient déjà posées sur le haut de sa tunique par la force de l'habitude, lorsque la vue de cette femme qui se déshabillait si naturellement sous sa tente le figea comme une statue. Déglutissant avec peine il n'osa ni bouger ni se dérober, observant silencieusement son dos nu. La bouche ouverte et la respiration retenue, l'archiviste finit par se détourner le cœur battant. Faisant glisser sa chemise par dessus sa tête, il découvrit son torse pâle dont la peau creusée d'une profonde cicatrice était bandée entre les côtes et l'épaule.
Tournant le dos à cette vue enjôleuse qui risquait de lui voler un précieux sommeil, Siha respira profondément et s'allongea le premier, faisant le plus de place possible à Emery. À moitié couché sur le côté, il se sentit douloureusement conscient de leur proximité une fois que la jeune femme l'eut rejoint. Néanmoins après une dizaine de minutes à la regarder la fatigue commença à rapidement gagner du terrain, et ses paupières lui pesaient de plus en plus. D'un dernier geste il dégagea quelques mèches du visage ébène, effleurant son front afin de se certifier que sa température était tombée. Une fois rassuré il ajusta la couverture sur les épaules nues de la Garde, se blottit contre l'agréable chaleur de son lit et se laissa glisser au pays des songes.

***


Exceptionnellement ses rêves furent tranquilles et son sommeil profond, sûrement parce que le thé qu'il avait bu la veille avait fait effet. Néanmoins lorsqu'il rouvrit les yeux aux premières lueurs de l'aurore, ce qu'il vit lui fit froncer les sourcils pour tenter de rassembler ses souvenirs épars.
Son menton reposait confortablement sur l'épaisse crinière d'Emery qui dormait encore à poings fermés, lovée contre son corps dans une étreinte intime. Lui-même n'était pas en reste non plus, ses deux bras entourant possessivement sa taille. Interdit une fois qu'il réalisa la position dans laquelle il se trouvait, Siha se mit à paniquer. Il avait déjà connu des épisodes de somnambulisme auparavant, mais ça c'était un tout autre niveau. Sans oser bouger de peur de la réveiller, il pressa son cerveau embrouillé comme un citron en vue de se remémorer la veille. Avaient-ils... ? Son cœur se mit à tambouriner à toute vitesse au manque de souvenirs clairs. Par ailleurs un murmure à peine audible attira son attention depuis l'entrée de la tente, où la tête de Sehariel passa sous l'encadrement de tissu.

Si les muscles de son corps ne bougèrent pas, il releva doucement la tête pour le regarder, la culpabilité écrite sur le visage. Son jumeau, choqué par ce qu'il venait de voir, ne tarda pas à repartir d'où il était venu sans le moindre mot... néanmoins pour Siha ce fut la douche froide. Confus et perdu, il avait encore du mal à garder les yeux ouverts. Sa tête retomba mollement sur l'oreiller et il resta là à regarder le plafond, vaincu. Quelle guigne... il aurait droit à une scène de ménage de la part de son benjamin, mais avec les bénéfices crapuleux en moins.
Effleurant les flancs de la mage d'un geste distrait, il sentit la nervosité monter petit à petit. Il aurait bien aimé pouvoir se lever ni vu ni connu afin de leur éviter un double malaise, mais elle l'enlaçait trop fermement pour que ce soit possible. N'osant baisser les yeux pour vérifier si elle recouvrait le bas de son corps de sa jambe ou si c'était le poids des couvertures, Siha se dit que parfois l'ignorance n'était pas si mal...
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